Pendant 80 minutes, "les petits" comme les appelait Roger Couderc vont faire face, rentrer dans le lard, tenter de feinter, 15 demi-dieux. Car, si ce ne sont que 15 hommes, comme nous, les Néo-Zélandais ne font pas que jouer au rugby, mais jouent, en dehors du terrain, et tout le temps, à être des All-Black, chaque jour, comme le garçon de café selon Jean-Paul Sartre dans "L’Etre et le Néant" se fonde dans l’habit et la fonction. Alors il faudra voir ou supporter la transe animale du Haka-qui-rit et ne tue pas, mais le promet. Les Blacks, dit-on, portent le deuil de la mort de leurs adversaires, parce qu’ils les "tuent", et une fois le crime accompli, respectent les morts, par sens du sacré. C’est ainsi que ces tout-noirs jouent leur jeu, écrit à l’avance, mais parfois, les "petits bleus" ont su contredire leur mort annoncée, leur défaite programmée, faisant mentir les augures, les prévisions astro-logiques. C’est ce qu’ils firent en 1999, au terme d’un match renversant, au terme duquel les supporters de l’équipe de France (français, mais aussi anglais, irlandais, gallois) savouraient la mousse d’un breuvage rarissime, la fatalité culbutée, l’impensable et l’impossible réalisés. Car, théorie politique ou scientifique, il est bien connu que les plus forts dominent les plus faibles, et, dans ce genre de défaite et de victoire, la loi réputée universelle et intangible est foulée au sol. Alors, c’est le vent de la liberté qui nous caresse la tête, un songe d’une nuit d’été…
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- Du rugby, des aristocraties, de la Coupe du Monde, France-Nouvelle Zélande, note 11
Une loi universelle et intangible foulée au sol…Peut-on parler encore d’une loi ? Je pencherai plutôt vers la dialectique hegelienne…
En tout cas, c’était un très beau retournement inattendu !
Puisqu’elle peut être foulée au sol, c’est qu’elle était, est, l’illusion d’une « loi ». Je ne peux pas et ne veux pas tout dire au lecteur et à la lectrice, c’est comme cela qu’on peut faire sortir du bois ou de l’ombre la compréhension attendue !
J’avais bien compris le sens profond de ta phrase…
D’ailleurs, il est vrai qu’il est triste, à l’instar des américains, de classer les gens selon 2 catégories : les « winner » et les « looser ». La vie est bien plus complexe que cela… Si le rugby peut nous en faire prendre conscience, c’est déjà un bon début.
Dialectique, comme tu l’as dit: pour ne jamais oublier ce que les « winners » perdent ou ont perdus, ou n’ont jamais gagné, eu, et ce que les « losers » ont, ont eu, n’ont pas eu le malheur de « gagner » – à développer dans une philosophie politique et économique renouvelée…