À l'origine présenté comme un moyen de mieux encadrer les États récalcitrants, l'esprit a changé. Désormais tout le monde est concerné, Allemagne comprise. « Dans le système actuel de coordination économique, la Commission apparaît toujours comme le père fouettard. L'introduction de contrats pourrait permettre de rééquilibrer les choses, de redonner de la marge aux États », explique une source européenne. Le document des services de Herman Van Rompuy insiste sur l'« appropriation » des réformes par les États membres : chacun des contrats serait élaboré « à la maison », par chacune des capitales, « en dialogue continu » avec les services de la Commission.
Concrètement ? À chaque État de trouver sa méthode pour rédiger ces contrats, « en impliquant des parlements nationaux, des partenaires sociaux et toute autre partie prenante dans le débat ». En cas de nouvelle majorité politique, issue d'élections, ces contrats pourraient être renégociés. « Ces contrats pourraient avoir du bon, s'ils permettent de renforcer la légitimité du système », reconnaît-on du côté de l'Élysée. « Prenez la réforme des retraites en France : elle a été perçue par beaucoup de citoyens comme le résultat d'une décision d'un fonctionnaire dans un bureau à Bruxelles, alors que c'était bien la décision du président français, de mener cette réforme… Cela ne peut pas continuer à marcher comme cela. »
Dans l'esprit de la Commission, le projet est toutefois plus raide : il s'agirait, ni plus ni moins, que de « contractualiser » les recommandations pays par pays formulées chaque année par l'exécutif européen, si l'on en croit une communication de mai dernier. L'exécutif de José Manuel Barroso y voit aussi l'occasion d'enraciner pour de bon une pratique, celle du semestre européen, dont rien ne dit qu'elle survivra à la crise, faute de légitimité.
Mais les équipes de Herman Van Rompuy et celles de José Manuel Barroso sont d'accord sur un point : ce type de contrat doit être suffisamment précis (sur le contenu des réformes et leur calendrier d'application) pour que la Commission puisse au fil des mois contrôler l'avancée des engagements. « Les déblocages d'emprunt seraient conditionnés à la performance », lit-on dans le document des services de Van Rompuy.
3 – QUELLES CONTREPARTIES FINANCIÈRES ?
Sur ce point, le flou est intégral. S'agira-t-il de subventions ? Mais de quelles lignes budgétaires seraient-elles tirées, en l'absence d'un budget propre à la zone euro ? Ou plutôt de prêts à taux préférentiel, comme semble le préférer Herman Van Rompuy ? Et quels sont les ordres de grandeur concernés ? Comment ces montants seraient-ils calculés, en fonction du type de réforme à mener ?
Une réunion des « sherpas », mardi à Bruxelles, en vue du conseil de décembre, a confirmé l'étendue des interrogations. Si bien qu'il est très improbable qu'un accord se dessine sur ce point au conseil de la mi-décembre. Un groupe de travail spécifique pourrait être mis sur pied. « C'est l'une des grosses faiblesses du texte, il ne dit rien des ordres de grandeur, et l'on sait bien qu'il y a quelques pays, en Europe aujourd'hui, qui s'opposeront de toute façon à ce que ces montants soient significatifs », commente un spécialiste de ces questions.
Autre difficulté
via www.mediapart.fr