Questions à André Bellon Président de l’Association pour une Constituante
Ancien Président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale
AL : L' « Association pour une Constituante » a, par comparaison avec l'immense majorité des associations, un étrange objet : un projet qui n'existe pas encore et pourrait ne jamais exister. Car, pour qu'une Constituante existe, à savoir une assemblée de citoyens qui se réunissent pour fonder ou refonder leur contrat social, il y faut un certain nombre de conditions, mais aussi et surtout, à la racine, un désir, et vous pensez que ce désir existe aujourd'hui, est partagé ?
AB : Oui. Il y a un désir et, de plus, il y a un besoin. De nombreux signes et évènements indiquent, prouvent, cette attente. Le référendum européen de 2005 en fut un, remarquable. Car devant cet enjeu politique majeur, il y a eu un vrai mouvement populaire, les citoyens se sont appropriés le débat que les dirigeants voulaient constitutionnel. Ils ont lu, débattu, le texte proposé et, par leur vote, les français, comme d’ailleurs les néerlandais, ont réaffirmé leur qualité de citoyen en disant non à un traité qui niait la démocratie. On sait comment, depuis, ses promoteurs ont, avec un cynisme assumé, réussi à nous l'imposer, via ce mini-maxi traité sarkozyen.
AL : Une Constituante réunit un petit nombre d'individus qui pensent, qui croient, être représentatifs d'un tout, un peuple, et qui pensent avoir une légitimité face à un pouvoir présent ou disparu qui lui ne l'a plus. Pouvons-nous parvenir à une telle situation et comment ?
AB : Par définition, une Constituante est une assemblée qui représente le peuple dans son ensemble, l'objet d'une telle réunion étant de changer les règles du contrat social, du jeu politique. Le système actuel ne permet pas, en effet, la représentation des diversités politiques, des réelles oppositions. Il est, par exemple, incroyable qu’avant l’annonce du référendum de 2005, il ait été constaté que plus de 90% des parlementaires étaient favorables à un traité que 55% des Français se sont révélés refuser. Il est encore plus incroyable qu’après ce vote, la représentation nationale théorique entérine un nouveau traité, jumeau du précédent. Où est alors la légitimité ?
AL : Avez-vous l'idée d'un délai pour la tenue d'une telle Constituante ?
AB : Non. La première question est de poser le problème. C’est ce que nous faisons. C’est à la fois un combat politique et un symbole. Une Constituante s'inscrit dans l'Histoire de la République, Les citoyens savent ou doivent savoir qu'il a un moyen historique qui a existé et qui peut à nouveau exister. Nous avons, cela étant, été confrontés à deux types de critiques : l’une tendant à dire qu’on n’y arrivera pas, ce qui est une vision fataliste classique et inacceptable car elle justifie la soumission à l’ordre existant ; l’autre tendant à dire qu’une Assemblée Constituante serait identique à l’assemblée actuelle, ce qui est tout aussi fataliste puisqu’on refuse de croire à la capacité dynamique des citoyens face aux évènements. Cela étant, bien sûr, il n’est pas question d’élire une Constituante sans garanties du libre choix démocratique des citoyens. Il faut donc réfléchir aux conditions d’élection, il fait rédiger préalablement des cahiers de doléances, toutes questions qui sont visibles sur notre site www.pouruneconstituante.fr et mises en œuvre par nos cercles locaux.
AL : Qui peut devenir membre de votre association ?
AB : Tout citoyen, qui adhère, en prenant connaissance de nos statuts et en les approuvant. Dans ces statuts, il est indiqué que chaque membre est attaché aux principes de la République, comme à ceux de la déclaration des Droits de l'Homme et di Citoyen de 1789.
AL : Certains parlent de Constituante européenne, non ?
A.B :C’est vrai. Ils ont, par avance, décidé d’une vision fédérale de l’union européenne à la quelle je ne crois pas. Je crois que la question de la construction européenne ne peut, face à l’impasse dans laquelle elle est aujourd’hui enfermée, que passer par la case « peuples ». Chaque peuple doit redevenir maître de son destin. Puis ils décideront ensemble de leur avenir commun.