Pierre Joxe et 1981: «Comment ne pas regarder en arrière, avec effroi et consternation» | Mediapart

Pierre Joxe a repris sa liberté. Devenu avocat commis d'office spécialisé dans le droit des mineurs, il ne fait plus de politique partisane mais il reste un citoyen engagé. Quarante années durant, Joxe a été l'un des plus fidèles lieutenants politiques de François Mitterrand, rencontré à la Convention des Institutions républicaines (CIR), en 1965. Il fut ensuite président du groupe PS à l'Assemblée nationale (81-84 et 86-88), ministre de l'Intérieur (84-86 et 88-91) puis de la Défense (91-93). Ancien président de la Cour des comptes (1993-2001), puis membre du Conseil constitutionnel (2001-2010), il a accepté pour Mediapart de faire le bilan des années Mitterrand. De ses leçons stratégiques léguées à la gauche d'aujourd'hui, comme des faiblesses et des renoncements qu'elle a aussi connus depuis.

Quelles sont les valeurs que Mitterrand a laissées à la gauche aujourd'hui?

Pierre Joxe

Pierre Joxe© Reuters

Même si Mitterrand dans sa jeunesse a été de droite, il a fini sa vie à gauche, en sachant exprimer au mieux des valeurs démocratiques et de justice sociale, et une conception des relations internationales dominée par le droit et guidée par la paix.

La principale valeur qu'il a léguée, et qui reste encore un sujet d'inspiration, c'est que dans un pays où les forces économiques jouent un très grand rôle dans la construction de l'opinion publique, seul un rassemblement des forces de gauche peut donner une chance d'accéder au pouvoir. Dans la Ve République, c'est une leçon majeure. Elle est valable aujourd'hui. En France, les chances de gouverner pour la gauche sont faibles, et avec une gauche divisée, elles sont nulles.

On peut parler d'audace ou de volontarisme, mais Mitterrand nous a donné une autre leçon stratégique: ne pas hésiter à affirmer des positions de gauche. Le Front populaire n'a pas gagné sur un programme tiédasse. Mitterrand n'a pas été élu avec son drapeau dans sa poche. Sur l'abrogation de la peine de mort, il s'est dit pour, bien que la majorité de l'opinion soit alors réputée contre. Une élection sur des positions ambiguës finit par se retourner contre le faux vainqueur. Ce fut la cause de la chute de la IVe République, qui n'a pas résisté à une victoire de la gauche ambiguë, élisant Pierre Mendès France, mais se retrouvant gouvernée par Guy Mollet.

Enfin, Mitterrand rappelait que la politique ne devait pas être une affaire de professionnels. Mitterrand était un très bon avocat, Mauroy était professeur, Jospin diplomate, Estier journaliste. Pour ma part, j'étais magistrat..

via www.mediapart.fr

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