L’Allemagne tire tous les profits de « la crise » des autres, qu’elle promeut | Mediapart

Il n’y a pas si longtemps, l’Allemagne se vidait de ses habitants. Les départs étaient plus nombreux que les arrivées. La population déclinait. Même les jeunes d’origine turque, pourtant nés sur place, retournaient vivre dans le pays de leurs ancêtres, à Istanbul le plus souvent, rebutés par le chômage et les discriminations. Mais, à la faveur de la crise en Europe, tout a changé. La tendance s’est inversée, les migrants affluent.

Les données publiées ce mardi 7 mai 2013 par l’Office fédéral des statistiques Destatis sont spectaculaires : en 2012, le nombre de nouveaux venus espagnols a augmenté de 44,7 %, grecs de 43,4 % et italiens de 39,8 %. Toutes nationalités confondues, plus d'un million de personnes ont émigré en Allemagne l'année dernière. Le solde migratoire, qui mesure les entrées moins les sorties, est le plus élevé depuis 1995 (+363 000). Il atteint 22 923 pour les Grecs, 21 716 pour les Italiens et 20 539 pour les Espagnols.

Les journaux font de ce boum migratoire leur événement, comme l'hebdomadaire Der Spiegel, qui vient de réaliser un dossier documentant « Le rêve allemand ». Profitant de la solidité de son marché du travail, l’Allemagne est devenue une destination prisée des salariés du sud de l'UE, chassés de chez eux par la récession et l’austérité. Et ce n’est pas par altruisme qu’elle ouvre ses portes, mais par nécessité.

« Le rêve allemand », titre d'un récent dossier du Spiegel à propos des nouveaux migrants.« Le rêve allemand », titre d'un récent dossier du Spiegel à propos des nouveaux migrants.

Les mouvements de population intra-européens, facilités par la liberté de circulation, sont en cours de reconfiguration. L'axe est-ouest reste important : Polonais, Roumains, Hongrois et Bulgares continuent d'émigrer. S'y ajoute un autre, orienté sud-nord : touchés de plein fouet par la crise, les jeunes Espagnols, Portugais, Grecs et Italiens retrouvent le chemin de la migration emprunté par leurs grands-parents dans les années 1960. Direction la Grande-Bretagne et surtout l’Allemagne, où les perspectives économiques, sans être « miraculeuses » comme dans l'après-guerre, sont moins mauvaises qu'ailleurs. Quelques-uns s’arrêtent en France. Mais ils sont moins nombreux, au point que le gouvernement français commence à s’inquiéter de son manque d’attractivité et prépare des outils pour assouplir les conditions d’entrée des étudiants et des travailleurs qualifiés (un débat sans vote au Sénat a eu lieu le 24 avril avant celui du 29 mai à l'Assemblée nationale). Mais Paris a déjà pris du retard par rapport à Berlin.

Sous la pression de perspectives démographiques alarmantes et de récurrentes pénuries de main-d’œuvre, le pouvoir fédéral a flairé l’aubaine et engagé il y a plusieurs mois une entreprise de séduction. Son accueil est sélectif : le pays tend les bras aux ressortissants du sud mais se méfie de ceux de l'est, notamment les Bulgares et les Roumains, jugés déjà suffisamment nombreux et trop pauvres.

La démarche est “proactive” : l’Agence

via www.mediapart.fr

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