Le 6 août dernier, Nathalie Michaud a donné un visage à cette catégorie de chômeurs. Devant les caméras, la voix tremblante, cette mère de famille, à l’allure fluette, interpelle le président de la République François Hollande alors qu'il s'apprête à visiter une agence Pôle Emploi à La Roche-sur-Yon, en Vendée : « C’est bien de s’occuper des jeunes mais nous… » À 52 ans, faute d’emplois, elle a dû retourner vivre chez ses parents. Cinq mois plus tard, elle vit toujours au domicile parental.
Mediapart l'a retrouvée et a choisi de donner également la parole à six autres chômeurs de son âge. Car si le gouvernement mise sur le contrat de génération au démarrage très poussif, et sur la réforme des retraites pour soutenir le maintien dans l’emploi des quinquas, il ne propose aucun outil spécifique pour réintégrer ceux qui sont exclus du marché du travail depuis des années. Qu’ils soient anciens ouvriers ou cadres supérieurs, tous partagent la même amertume face à l’âge de la retraite qui recule. Et la même incompréhension : pourquoi le monde du travail ne veut-il plus d’eux ?
Premiers mois de chômage, premières interrogations
Gérard Carrier a tout de suite très mal vécu le fait de ne plus travailler. « Je me souviens du premier jour. Je me suis levé, j’ai regardé par la fenêtre et je me suis dit : mais qu’est-ce que tu vas faire ? Tu ne vaux plus rien. » Cet ancien cadre logistique de la région lyonnaise, qui travaillait « 10 à 15 heures par jour » a été pris d’une peur qui ne l’a plus lâché, celle de « vivre au crochet de la société ». Gérard Carriez raconte avoir perdu 10 kilos au cours des trois premiers mois.
Chez Jean-Paul Gaudin, la crainte de l’irrémédiable n’est apparue qu’au bout d’un an. Après être tombé au chômage en 2009, il parvient en effet à conserver quelques missions, pense d'abord à « une transition ». Mais depuis 2010, « plus rien de significatif ». Ancien directeur financier d’un grand groupe anglo-saxon de matériel informatique, puis patron d’une entreprise de traduction de manuels de téléphonie, il atterrit brutalement. « Un jour, à l’APEC (association pour l'emploi des cadres), je me suis retrouvé entouré de plein de gens formidables de mon âge qui ne trouvaient pas d’emploi. J’ai compris. »
S’ensuit un profond malaise : « L’impression de ne servir à rien. De n’avoir rien fait de ma vie. » Et des regrets : « Je me dis que je n’ai pas bien choisi ma voie. » À 56 ans, lui qui gagnait encore 12 000 euros par mois il y a quelques années, se prend à regretter de ne pas avoir fait médecine, comme il l’avait envisagé près de 40 ans plus tôt.
À 59 ans, G
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