Soudain, le gouvernement américain a accéléré. Alors que la crise financière a commencé depuis plus de six ans, que les discussions sur les nouvelles régulations financières – dites lois Volcker – s’éternisent depuis plus de trois ans, il n’y avait brusquement plus de temps à perdre : les textes sur la nouvelle réglementation bancaire devaient absolument être adoptés avant la fin de l’année.
Dans la précipitation, les cinq autorités chargées de contrôler le secteur bancaire et financier – dont la Réserve fédérale (FED), la Securities and exchange commission (SEC), la commodity futures trading commission (CFTC) – ont rendu leur copie, mardi. Un texte de plus de 800 pages qui devait être adopté dans la foulée par le Sénat.
Au milieu des milliers de dispositions et de procédures retenues, quelques questions s’imposent : quelles leçons ont été retenues de la crise ? Les banquiers et les financiers vont-ils être tenus responsables de leurs actes ? Le système financier va-t-il être moins vulnérable ?
Frappé par le déferlement de la crise financière qui avait menacé d’engloutir tout en 2007-2008, l’ancien président de la Réserve fédérale, Paul Volcker, avait tiré un avis tranché sur les événements : le système financier mondial avait un besoin urgent de retrouver une stabilité afin de permettre le développement de l’économie. Et la seule façon pour y parvenir était de revenir à une séparation stricte entre les banques de détail et les banques d’investissement, comme au temps du Glass-Steagall Act, afin d’échapper au chantage des banques sur les États et l’économie, au nom du too big to fail.
Les milliers de contre-propositions avancées par les banques et leurs avocats, les milliers d’heures de lobbying auprès des élus de tout bord – le monde bancaire figure en tête des donateurs des élus américains – , des entreprises et autres groupes d’influence, les centaines d’amendements présentés jusqu’à la dernière minute ont eu raison des idées de Paul Volcker, un moment conseiller économique de Barack Obama.
Bien que les grandes banques de Wall Street comme Goldman Sachs, JP Morgan ou Citi continuent à dénoncer une loi qui les assassine, il ne reste plus grand chose de la volonté de réforme de l’ancien président de la Réserve fédérale dans le texte soumis au Sénat américain. Comme la France, le gouvernement américain est en train de rater sa réforme bancaire. La grande loi de régulation du monde bancaire s’est transformée en un texte confus, reposant sur le bon vouloir des banquiers et la vigilance des régulateurs.
Officiellement, l’activité de trading pour compte propre est désormais interdite aux banques. Mais les banquiers de Wall Street n’ont pas manqué de mettre en avant la nécessité d’offrir à leurs clients tous les services dont ils avaient besoin, d’assurer les contreparties sur tous les marchés, de leur proposer des couvertures sur les risques. Ils ont fini par obtenir les « flexibilités » qu’ils demandaient.
Soulignant combien ils étaient nécessaires aux États pour acheter leurs dettes, ils ont d’abord obtenu de pouvoir conserver leur activité de trading pour compte propre sur le marché des obligations souveraines, sans restriction pour les titres américains et avec un peu plus d’encadrement pour les autres.
Le reste a suivi. À l’avenir, les banques pourront conserver leurs activités de market making (de tenue de marché), acheter et vendre des actions, des obligations, au nom de leurs clients. Elles pourront aussi continuer à offrir des produits de couverture, des dérivés, proposer des contreparties, à la condition, précise la loi, qu’elles démontrent par des tests indépendants, que leurs portefeuilles de couvertures et de dérivés permettent « de réduire ou d’atténuer significativement un ou plusieurs risques identifiés ».
La ligne de partage entre ces activités e
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