1675 – 2013 : actualité et réalité historique des Bonnets rouges bretons – Page 1 | Mediapart

Le mouvement antifiscal breton, qui se réunit ce samedi à Carhaix après plusieurs semaines de mobilisation contre l'écotaxe, a mobilisé l'imaginaire historique des Bonnets rouges de 1675 autour d'une alliance entre salariés licenciés de l'agroalimentaire, syndicalistes agricoles et petits patrons de transports routiers. Mais que se cache-t-il derrière cette réappropriation de la mémoire bretonne ? Que sait-on exactement de la révolte de 1675 ? Comment a agi la mémoire de ce mouvement en Bretagne au fil des siècles ? Les deux mobilisations sont-elles vraiment comparables ?

Entretien avec l'historien Alain Croix, professeur émérite de l'université de Nantes, chercheur associé du Centre de recherche bretonne et celtique de l'université de Brest, qui a publié de nombreux ouvrages sur l'histoire de la Bretagne, et aussi conçu des films documentaires pour le compte des Presses universitaires de Rennes.

En préalable, quel est le matériau de recherche disponible pour un historien travaillant sur la révolte des Bonnets rouges ?

L'historien Alain CroixL'historien Alain Croix © dr

Comme pour tout mouvement populaire du XVIIe siècle, il existe surtout des témoins extérieurs, mais peu de paroles de révoltés eux-mêmes. L’essentiel de la documentation réside dans les « archives de la répression » de cette révolte. Néanmoins, on a quand même la chance d’avoir des témoignages directs que sont plusieurs codes paysans, l’ancêtre des cahiers de doléances, écrits directement par les Bonnets rouges à cette époque. Petit à petit, certaines archives judiciaires seront aussi dévoilées, révélant l’état d’esprit de l’époque, avant ou après la révolte de 1675. On a donc une vision déséquilibrée dans les sources, mais quand même pas unilatérale.

Quelle est selon vous la nature de cette révolte d’alors ? Contre le roi ? Contre le pouvoir central ? Contre l’impôt ?

Si l’on parle bien de la révolte rurale de l’été 1675, qui se déroule dans une bonne partie du Finistère et des Côtes-d’Armor actuels, et dans une petite partie du Morbihan, elle est d’abord sociale, et elle reste essentiellement sociale. Ce sont des paysans rejetant toute forme de prélèvements. Or, les prélèvements les plus immédiats et les plus lourds sont ceux des seigneurs. Donc c’est d’abord une révolte antiseigneuriale. Très vite, la révolte s’en prend aussi au clergé, qui est aussi un percepteur, notamment de la dîme, et aux agents du roi et de la province de Bretagne, qui collectent aussi l’impôt. C’est donc une révolte antiprélèvements, et pas simplement une révolte antifiscale. Les révoltés ne s’en prennent jamais au roi. Au contraire, quand les codes paysans en parlent, c’est souvent dans l’idée, classique au XVIIe siècle, de l’exonérer. « Ah, si le roi savait ce qu’il se passe… »

Quelle est la place des Bonnets rouges dans les révoltes du XVIIe siècle ?

© dr

La plupart de celles qui ont marqué le siècle se passent dans les années 1620/1650, et concernent majoritairement les hausses d’impôt décidées par Richelieu pour financer la guerre et l’absolutisme. À ce moment-là, la Bretagne ne se soulève pas, car elle est sous-imposée et en pleine phase d’expansion économique. T

via www.mediapart.fr

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