Elles ont 28 et 34 ans et sont deux des blogueuses les plus en vue en
Tunisie, pendant et depuis la révolution. Régulièrement invitées sur les
antennes tunisiennes comme à l’étranger, Henda Hendoud et Emna Ben
Jemaa (qui anime chaque semaine une émission sur la radio
expressFm) ont été de ces dix mois de bouleversement intense et de
(re)composition politique, intellectuelle et militante. Pour Mediapart,
elles débattent sans tabou du contexte pré-électoral, mais aussi de la
Tunisie post-14 janvier, des clans toujours en place et de la permanence
des cadres de l'ancien régime, de l'islam politique, de l’absence de
justice transitionnelle, et de tout ce que la révolution a changé dans
leur quotidien.
A deux jours de l'élection, que vous évoquent les annonces d'alliances potentielles au sein du camp dit progressiste, qui regroupe les organisations Ettakatol, Parti démocrate moderniste, Parti démocrate progressiste (PDM), Parti démocrate progressiste (PDP), Afek, Parti du travail tunisien (PTT) contre le parti islamiste Ennahda, grand favori?Henda Hendoud. C'est tout de même curieux: en mars, le PDP avait refusé toute alliance, se sentant assez fort pour aller seul aux élections. Ahmed Nejjib Chebbi avait une belle cote, c'est plus compliqué aujourd'hui pour lui.
Emna Ben Jemaa. Il y avait alors une initiative de jeunes Tunisiens, «Ensemble contre la désunion», qui avait tenté de faire naître une alliance contre les anciens du RCD et les intégristes, sous-entendu le parti Ennahda. Ils ont réuni des partis et des associations. PDP et Ettakatol ont refusé, en disant qu'ils ne souhaitaient pas intégrer une alliance dont le principal enjeu est de s'opposer à un autre projet.
Pourtant, aujourd'hui, c'est clairement ce qu'ils ont essayé de mettre en place, apparemment sans succès.
Henda Hendoud. C'est très pragmatique: le PDP ne s'estime plus assez fort pour rentrer seul dans la Constituante. Il ne suffit plus à Chebbi de rappeler son passé d'opposant politique, et tout le monde sait qu'il a noué des alliances avec les ex-RCDistes. Il a mené une campagne présidentielle tout au long de l'année, et ses ambitions ont fini par le trahir: nous allons élire une Constituante, pas un président !Emna Ben Jemaa. Ettakatol a tenté de se rapprocher d'Ennahda pour lui prendre une partie de son électorat. C'est aussi ce qui explique la montée en puissance du parti de Mustapha Ben Jaafar, qui n'était pas aussi fort ni présent en février. A un moment, il était même question entre eux d'un gouvernement d'union nationale, Ennahda obtenant notamment les ministères de l'Éducation et de la Défense. Ettakatol a finalement fait marche arrière, parce que cette idée a créé une grande polémique. Beaucoup de Tunisiens étaient effrayés par la perspective qu'Ennahda gère l'éducation de leurs enfants! Toute cette stratégie a nui au rapprochement du camp dit progressiste, et explique pour partie sa di
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