Thermidor, la Révolution brisée (2), par Vingtras

9 Thermidor An II (27 juillet 1794). Contre Robespierre jouent la mauvaise conscience des ex-représentants en mission que leur passé inquiète mais surtout les grands courants de profondeur agités par une bourgeoisie d'affaires qui a résolument tourné le dos à la vertu républicaine.

La Convention ouvre sa séance vers 11 heures du matin. A midi, Saint-Just prend la parole ; il est interrompu par Tallien. Billaud-Varenne attaque Robespierre ; celui-ci veut monter à la tribune, mais Collot d'Herbois, qui préside, lui refuse la parole et agite sa sonnette pour couvrir sa voix. Barère fait voter un décret ôtant à Hanriot le commandement de la garde nationale. Sur la proposition de Louchet, un décret d'accusation contre Robespierre, Saint-Just et Couthon est voté. Augustin Robespierre et Lebas sollicitent l'honneur d'être joints au triumvirat accusé. "La République est perdue, s'exclame Robespierre, les brigands triomphent !".

Le dernier acte va se jouer place de Grève. La Commune et Hanriot, dès qu'ils sont alertés, font sonner le tocsin afin de mobiliser les sans-culottes. Transportés dans diverses prisons de la capitale, les cinq sont bientôt libérés mais tardent à se rendre à l'Hôtel de ville. Couthon y arrivera le dernier, peu après minuit. Les accusés sont indécis, découragés car la mobilisation des sections est un échec : seize sections seulement (sur quarante-huit) ont envoyé des hommes.

Pendant ce temps, la Convention agit. Barras reçoit le commandement des forces armées et rassemble des contingents des beaux quartiers de Paris ( l'Ouest et du Centre de la capitale). Les insurgés sont mis hors la loi…ce qui équivaut à une condamnation à mort, sans procès.

"Depuis le 10 août 1792, la révolution a été entraînée par la guerre et la pression de la foule parisienne hors du grand chemin tracé par l'intelligence et la richesse du XVIIIe s. Une passion égalitaire est remontée en surface, qui, au delà des pauvres formules élaborées, révèle la puissance des humiliations accumulées et la coloration des visions populaires. Ce qui affleure, c'est l'image inversée de la société d'Ancien Régime où tout était ordres et privilèges. Le monde de la revendication sans-culotte est un monde sans hiérarchie, sans singularité, sans prestige de la fortune ou du talent ; un monde où doit disparaître tout ce qu'évoque ce mot maudit : aristocrate. Au-delà de la Révolution qu'a si bien comprise Jaurès, c'est la révolution intuitivement saisie par Michelet : celle des forces obscures de la misère et de la colère…

Danton a payé de sa tête la recherche d'une solution qui n'était qu'un compromis. Robespierre va perdre la sienne pour n'avoir tracé aucune perspective (sociale). Car d'un côté, la guerre a légué la Terreur, qui provoque une conjonction des refus. Les paysans détestent les réquisitions, les bourgeois aspirent à la douceur de vivre, et le peuple ne veut plus fournir son contingent aux tombereaux tragiques."*

via blogs.mediapart.fr

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