Retraites : une seule solution, consacrer plus de ressources ! | Mediapart

L'objectif de cette réforme est aussi de répondre aux prévisions du Conseil d’orientation des retraites. Dans ce rapport, l’organisme pointe un besoin de financement de plus de 20 milliards d’euros à l’horizon 2020. La réforme de 2010, pourtant très décriée par la gauche et jugée injuste, n’a donc pas suffi ?

Si l'on veut saisir l'enjeu des retraites, il ne faut pas s'en laisser imposer par le petit jeu des projections. Mais 20 milliards d'euros en 2020 dans un système qui aura vu d'ici là transiter par lui plus de 3 000 milliards d'euros, ce n'est rien. Un éventuel besoin de financement de 105 milliards d'euros d'ici 2060 ou, à cette même date, un éventuel excédent de 93 milliards d'euros dans un système qui d'ici là aura vu transiter probablement plus de 16 000 milliards d'euros, c'est plutôt la preuve que le système est là pour durer. On a tendance à déduire de ces projections que nous n'avons pas d'autre choix que de “faire des sacrifices”. Or bien sûr que nous avons le choix. 20 ou 105 milliards d'euros supplémentaires à prendre d'ici 10 ou 50 ans dans le “gâteau” du PIB qui sera plus gros n'est pas un “problème”, c'est un choix politique.

Le vrai problème au sens d'“enjeu de société”, et vous l'avez d'ailleurs évoqué dans votre première question, est le suivant : voulons-nous vivre dans une France et une Europe soumises au petit monde de la finance ou avons-nous un autre projet de société pour le demi-siècle à venir ? Autrement dit, voulons-nous pousser plus loin les institutions salariales (sécurité sociale, salaires conventionnés, Smic, statuts de la fonction publique, etc.) qui, depuis plusieurs décennies maintenant, aspirent à fonctionner sur un mode démocratique ? Ou est-ce que nous nous abandonnons à l'oligarchie financière qui a fait son retour depuis le milieu des années 1970 alors qu'elle avait déjà échoué dans les années 1930 à porter un vrai projet de société ? C'est dit avec trop d'emphase à mon goût mais je veux bien faire comprendre que le salaire et la protection sociale, tels qu'ils se construisent depuis grosso modo la fin de la première guerre mondiale, sont des institutions qui s'opposent frontalement à tout ce que peut porter la sphère financière, cet ennemi qui n'est “invisible” que pour ceux qui ne veulent pas le voir. 

Au sujet de la réforme Woerth de 2010, celle-ci n'a jamais eu vocation à assurer le financement des retraites sur le long terme. Il s'agissait de faire sauter l'âge symbolique des “60 ans”. C'est-à-dire la possibilité d'obtenir une pension de base au taux plein dès 60 ans à condition de disposer de 37,5 annuités. La droite et le patronat n'ont jamais pu supporter cet âge de “60 ans” qui pour eux représentait une victoire des socialistes, ce qu'il n'est d'ailleurs pas !

Il s'agissait au contraire de l'aboutissement d'un long processus historique entamé il y a plus de cent ans avec la retraite des fonctionnaires ; et de prendre acte du fait qu'au début des années 1980, avant même que l'ordonnance de 1982 n'ait été ratifiée, 40 % des nouveaux retraités liquidaient déjà leur retraite à 60 ans ou avant grâce à un certain nombre de dispositions concernant des publics cibles.

via www.mediapart.fr

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