Retraite toujours plus tard : la « double peine » des ouvriers – Page 1 | Mediapart

La base de ces affirmations est indéniable. L’espérance de vie augmente régulièrement en France, et en Europe. Les derniers chiffres de l’Insee donnent une espérance de vie de presque 85 ans pour les femmes, et d’un peu plus de 78 ans pour les hommes. Les Français vivent parmi les plus vieux en Europe, et en quinze ans, ils ont gagné environ trois ans d'espérance de vie (celle des hommes a progressé plus vite, mais l'écart hommes-femmes se réduit très lentement). En moyenne, l’espérance de vie augmente d’un trimestre par an.

Mais lorsqu’on parle de départ à la retraite, se baser sur l’espérance de vie à la naissance est-il pertinent ? Si elle augmente, cela signifie certes que les Français vivent plus vieux, mais aussi qu’ils meurent moins souvent lorsqu’ils sont jeunes. En théorie, une espérance de vie en augmentation peut donc aussi vouloir dire que plus de personnes atteignent l’âge de la retraite. « La diminution de la mortalité prématurée constitue une part assez faible des gains en espérance de vie, mais elle existe, nuance Emmanuelle Cambois, directrice de recherche à l'Institut national d'études démographiques (INED) et grande spécialiste de ces questions. En réalité, depuis de nombreuses années, les plus gros contributeurs à l’augmentation de l’espérance de vie sont les personnes les plus âgées. »

La donnée à prendre réellement en compte est l’espérance de vie à 60 ans, qui indique combien de temps ceux qui arrivent à 60 ans vont rester en vie, en moyenne. Logiquement, elle est plus longue que l’espérance de vie à la naissance (qui englobe aussi toutes les morts avant 60 ans, ce qui fait « baisser la moyenne »). Là aussi, les chiffres augmentent, à peu près au même rythme. Selon l'Insee, à 60 ans en 2000, on pouvait espérer vivre 20,4 ans pour les hommes, et 25,6 ans pour les femmes. En 2010, c’était 22,4 années pour les hommes et 27,2 pour les femmes.

Cette augmentation rapide vaudra-t-elle pour les années à venir ? Le Conseil d’orientation des retraites (COR) en doute. Dans son rapport le plus récent, publié en janvier dernier, le conseil fait le point sur le temps effectivement passé à la retraite. Et les résultats ne sont pas flamboyants pour les générations qui ne l’ont pas encore prise. En l’état actuel de la législation, le temps effectivement passé à la retraite, qui augmente rapidement pour les générations nées jusqu’en 1950, ne progresserait que très modestement pour celles nées après 1955 : environ un an de plus à la retraite gagné en vingt années. Pour les autres, nées entre 1950 et 1955, le temps effectivement passé à la retraite baisserait carrément d’un an « car le relèvement des âges légaux de la retraite en cinq ans est plus rapide que la progression de l’espérance de vie à 60 ans ».

© (DR)

Autant dire que même avec l’hypothèse la moins sévère du rapport Moreau, qui verrait une augmentation de durée de cotisation d’un peu moins d’un an étalée sur cinq années, le résultat serait inéluctable : le temps passé effectivement à la retraite diminuerait pour tout le monde.

via www.mediapart.fr

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