Primaire PS: est-ce la fin du politique? Un dialogue tendu entre Paul Alliès et Remi Lefebvre | Mediapart

Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à
l'université de Lille, est l'auteur du livre Primaires
socialistes: la fin du parti militant
(éditions Raisons d'agir, 2011). C'est une analyse aiguë et très critique du système de la primaire tel que mis en place par le PS et de ses conséquences à long terme: dévitalisation des partis, abaissement du débat politique, suprématie des sondages et de la personnalisation, reconnaissance béate du présidentialisme induit par la Ve République.

Paul Alliès, professeur de sciences politiques à l'université de
Montpellier, est secrétaire national
adjoint à la rénovation du PS, partisan d'Arnaud Montebourg. A ce titre, il a été l'un des principaux concepteurs et mécaniciens de cette primaire, qu'il défend avec tout autant de virulence et dans laquelle il voit un levier pour basculer le vieux parti. Du coup, il devenait indispensable de les faire se rencontrer et débattre: la primaire signifie-t-elle à terme la fin de la politique?

Vous avez deux
analyses radicalement opposées de ce qu'implique l'organisation d'une primaire socialiste. Alors, après plusieurs semaines de
campagne, et à quelques jours du premier tour, le 9 octobre, vous sentez-vous l'un
et l'autre conforté ou déstabilisé?

Rémi Lefebvre.
Je m'intéresse davantage aux transformations structurelles que les
primaires traduisent et qu'elles vont accélérer, qu'au temps
court de la campagne… Selon moi, en allongeant le temps
présidentiel, on va entrer dans un processus de primaire permanent
qui commencera dès le lendemain de la défaite. Sinon, c'est
un moment de politisation intéressant. Mais dans le contexte d'une
démocratie d'opinion médiatique, le débat se réduit à une
course de chevaux. On ne parle que des sondages, et de la course en
tête de François Hollande… On ne parle plus beaucoup du projet.
Car les primaires poussent à une logique de différenciation.

Paul Alliès.
Les primaires ont été construites sur un consensus, laborieux mais
efficace… Du coup, elles induisent une transformation du parti
socialiste. Nous avions un problème de leadership, qui n'avait pas
été réglé par le congrès de Reims. Sans les primaires, imaginons
ce qui se serait passé avec
l'élimination de Strauss-Kahn! C'était Reims au carré.
Les égos se seraient entre-déchirés, dans un congrès bien fermé
et un vote des seuls militants. Et on serait allé droit dans le mur!

Là, nous avons
bâti une procédure, avec une convention de rassemblement de tous
les candidats après le vote, qui va à l'encontre de longues
années de déchirements au parti socialiste. La procédure s'est
solidement installée et elle peut résister aux sondages et à la
sphère médiatique car elle s'est créé un espace autonome mais
que le parti contrôle.

Rémi Lefebvre.
C'est en formulant les problèmes du parti socialiste comme une
crise de leadership que les primaires se sont imposées. Or je
conteste le diagnostic. Le PS a toujours eu des problèmes de
leadership: seule la victoire les a réglés. Entre 1995 et 1997, on
disait de Jospin qu'il n'avait pas le leadership. La question a
été réglée quand il est devenu Premier ministre.

Les luttes
internes sont propres aux partis politiques. Mais le problème est
qu'il n'y a plus de luttes idéologiques. Il y a une
dépolitisation du PS et la sur-personnalisation cache un vide
idéologique. Il suffit de regarder l'accélération des
traject

via www.mediapart.fr

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