Après avoir été évacués à deux reprises du parc des Buttes-Chaumont (XIXe arrondissement de Paris), la vingtaine de jeunes Tunisiens, qui dormaient là depuis six jours, ont été interpellés ce mercredi matin. Parmi eux, trois ou quatre mineurs.
Lundi après-midi, on pouvait encore les croiser sur les bancs du parc. Des jeunes hommes, à la rue depuis le 16 juin, date de leur expulsion du 36, rue Botzaris, qui abritait la section française du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), parti de Ben Ali, Président renversé le 14 janvier.
Des heures entières, ils restaient là, bavardaient, fumaient et buvaient un peu de bière en attendant que quelque chose se débloque. Ce jour-là, ils n'avaient pas envie de parler : « Encore un journaliste, mais pourquoi ? » Ils ont entre 18 et 30 ans, sauf cinq d'entre eux, plus jeunes et pressés de repartir.
« Il n'y a rien à faire là-bas, mais, ici, on passe la journée au parc »
Salem a une vingtaine d'années. Il était étudiant en gestion, imaginait son avenir bouché et a tout logiquement profité du vide sécuritaire aux frontières pour embarquer à destination de Lampedusa. Un long voyage qu'il regrette :
« J'ai dépensé 2 700 euros et maintenant je veux revenir. Au pays, tout le monde veut venir en Europe, mais ça a changé maintenant. Ils se rendent compte que ce n'est pas le paradis. Parce qu'on leur raconte et que d'autres sont rentrés.
Ici, personne ne peut vraiment nous aider. Les amis tunisiens ont déjà leur vie, c'est chacun pour soi. »
Pourquoi avoir fait le voyage et ne pas avoir cru à une vie meilleure en Tunisie après la révolution ? Cette idéalisation des événements de janvier lui fait hausser les épaules :
« Mais c'est difficile, ça prend du temps de changer un système. Ça n'a pas tellement changé pour nous, sauf en pire. Le tourisme ne tourne plus et, à la frontière libyenne, il n'y a plus de travail alors qu'on vivait justement du commerce avec la Libye. C'est pour ça que je me suis dit qu'il n'y avait rien à faire là-bas.
Mais ici, on passe la journée dans le parc. C'est pas possible de rester là, à dormir dehors, à ne pas manger, à ne pas fumer. »
« La baisse de l'aide au retour est une aberration »
En contrebas, deux de ses compagnons se font courser par un petit chien qui aboie. Gamelle. Ça le fait beaucoup rire. « Ce sont les enfants de la chute des barbelés tunisiens, des jeunes du Sud, maîtrisant mal le français et désormais à l'abandon », s'indigne Pierre Henry, de France terre d'asile (FTA), qui s'occupe des 700 à 800 Tunisiens arrivés après le 14 janvier. Il parle d'une situation jamais vue :
« Il y a une véritable politique de maltraitance. Ça consiste à les laisser à la rue, à les interpeller, à les mettre en garde à vue, à les reconduire à la frontière italienne, à diminuer l'aide au retour à laquelle ils pouvaient prétendre. Cette politique est non seuleme
via www.rue89.com
S’abonner
Connexion
0 Commentaires
Le plus ancien