Les héritiers de Sankara face à une révolution confisquée | L’Humanité

Ouagadougou, Fada (Burkina Faso), envoyé spécial.

Plantés au milieu du bitume, deux vautours s’acharnent sur les restes d’une carcasse tandis que les autobus, voitures et poids lourds chargés de marchandises en provenance du Niger, du Togo ou du Bénin esquissent un petit mouvement de roue pour éviter les imperturbables charognards. L’axe routier qui relie Ouagadougou à Fada N’Gourma (50 000 habitants, capitale de la région de l’Est), traverse la commune de Zorgho, fief du grand favori du scrutin, le social-démocrate Roch Marc Christian Kaboré, dont les affiches de campagne saturent l’espace public, devançant en nombre celles de son challenger libéral Zéphirin Diabré. En dépit de sondages peu flatteurs (un peu moins de 5 %), les militants du principal parti sankariste, l’Unir/PS, croient en leur chance. « Il suffit que nous accédions au second tour, et le pays se rangera derrière nous », tente de se convaincre Souleymane, âgé d’une trentaine d’années, après un meeting tenu à Fada le 23 novembre, place de l’Unité, par le candidat de l’Unir/PS Me Bénéwendé Sankara. Autre difficulté, Mariam Sankara, icône nationale et veuve du leader panafricaniste assassiné en 1987, a dû jeter l’éponge pour raisons de santé et annuler son déplacement au Burkina pour soutenir la campagne du parti.

 

La force de frappe financière des favoris

C’est donc de France, où elle vit en exil depuis plus de vingt-cinq ans, qu’elle a enregistré un message vidéo diffusé sur les réseaux sociaux. Mais dans ce pays pauvre et enclavé, où 80 % de la population vit de l’exploitation de sa terre, les « révolutions » Facebook ou Twitter, qui ont tant fasciné les Occidentaux au moment de la chute des despotes tunisien ou égyptien, n’auront qu’un impact marginal sur le scrutin. Ici, il faut sillonner les petits villages reculés et convaincre de la nécessité du développement endogène, l’un des piliers de la pensée politique de Thomas Sankara, quand les projets de désenclavement promus à l’entrée des centres urbains rappellent la mise sous tutelle du pays par « l’aide » extérieure, qu’il s’agisse de l’Union européenne ou de l’Usaid, bras armé « humanitaire » du Département d’État américain.

via www.humanite.fr

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