Les gros bidouillages du « Petit Journal » de Canal + – Acrimed | Action Critique Médias

Jean-Luc Mélenchon et Eva Joly ont refusé de se saluer ? Faux : ils l’ont fait, mais pas devant les caméras du « Petit Journal ». Les militants du mouvement Debout la République n’ont rien compris au meeting de Nicolas Dupont-Aignan ? Faux, car ils ont été interrogés avant que leur leader s’exprime. Mélenchon est omniprésent, comme le montre une petite compilation de ses passages dans les médias ? Faux encore, car les porte-paroles de l’UMP et du Parti socialiste occupent toujours plus de 70 % du temps de parole cumulé. David Douillet n’est pas brillant quand il défend une loi face aux députés ? Peut-être, mais est-ce bien la réalité, quand on le voit hésiter seulement à quatre reprises sur 2 h 30 min d’audition ?

Depuis quelques semaines, nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les « méthodes » du « Petit Journal ». Tourner en dérision les mensonges des responsables politiques et leur stratégie de communication ? Pourquoi pas. Pour peu que cette critique n’épargne pas les journalistes qui, en meute, suivent les candidats et acceptent leurs mises en scène. Mais, surtout, le décryptage satirique de la communication politique cesse d’être crédible quand règne une fausse impertinence qui repose… sur des faux.

Est-il légitime de brandir une carte de presse quand on se livre à des activités qui tournent le dos aux règles les plus élémentaires du journalisme ? La réponse est évidemment négative. Est-il légitime de refuser de se laisser intimider par la possession d’une carte de presse quand l’usage en est usurpé. La réponse est évidemment positive. Explications.

Erreur de comptabilité

La mise en scène est efficace. La démonstration est implacable. Alors que Mélenchon cite un rapport du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur le temps de parole des candidats à l’élection présidentielle lors d’un meeting (« Depuis le mois de janvier, 70 % du temps d’antenne a été réservé à deux partis : le PS et l’UMP »), Yann Barthès, l’animateur du « Petit Journal », le reprend : « Mais si on regarde le fameux dossier du CSA sur lequel il s’appuie, disponible sur tous les bons sites du CSA, nous remarquons qu’il s’agit d’une comptabilisation du 1er au 27 janvier. Oooh, c’est trop bête, Jean-Luc Mélenchon a oublié les deux ou trois petites choses qu’il a faites depuis le 27 janvier. » Suit alors une compilation des passages filmés de Mélenchon (RTL, France Info, RMC, France 2, France Inter, TF1…) sur une dizaine de jours (du 27 janvier au 7 février). Compilation qui donne l’impression d’une surexposition du candidat du Front de gauche, histoire de démontrer que Mélenchon prend des libertés avec les faits. Ce serait de l’information… Puis Barthès change de sujet, comme on change de chaîne.

Or cette séquence – pas plus qu’une autre, mais pas moins non plus – est révélatrice de la méthode de travail du « Petit Journal ». Alors que le rapport du CSA et la réaction de Mélenchon portent sur une période, on oppose à ce dernier la suivante, comme si les nouvelles invitations devaient être suivies d’invitations aussi nombreuses, alors que l’on peut être quasiment certain que cela ne sera pas le cas. Une observation non partisane – journalistique ? – devrait porter sur une plus longue période…

Mais surtout – « Oooh, c’est trop bête », comme dit Barthès – il aurait fallu comparer la présence du Front de gauche avec celle, par exemple, du PS. Et ce travail d’observation aurait vite été périlleux. En effet, sur seulement deux jours (mercredi 8 et jeudi 9 février 2012) les porte-paroles du PS se sont rendus à onze reprises dans les médias audiovisuels, comme on peut le vérifier en note [

via www.acrimed.org

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