"Bouh, on paie trop d'impôts". Depuis quelques semaines, c'est le nouveau cri (ou pleur) des banquiers. Ils sanglotent quand ils rencontrent Pierre Moscovici, ils pleurnichent quand ils s'adressent à une presse très complaisante. C'était à la Une du Monde-Eco, en septembre (à lire ici, en lien payant), c'était dans les Echos la semaine dernière, et c'était de nouveau dans les Echos lundi avec une Une très offensive: "Impôts: le cri d'alarme des banques". Et, pour incarner cet establishment bancaire poujado-larmoyant, Jean-Laurent Bonnafé, le directeur général de BNP Paribas (photo), actuellement président de la Fédération bancaire française (FBF), le lobby des banquiers (son interview, à lire ici).
Ces doléances doivent-elles être prises au sérieux? Oui. Vu le peu de résistance du gouvernement aux pressions patronales (ce que l'épisode de la taxe sur l'excédent brut d'exploitation a montré) et vu la personnalité du ministre des Finances, qui se fait un devoir de défendre l'industrie financière hexagonale, ce lobbying anti-impôts risque d'avoir des effets importants. Je pense notamment au projet européen de taxe sur les transactions financières, qui pourrait ne pas voir le jour devant le peu de mobilisation politique, notamment français (à lire, mon article sur le sujet, ici). Alors, oui, il est nécessaire de démonter ces discours.
Prenons d'abord la chaîne de raisonnements développée par les banquiers, et regardons, ensuite, dans le détail, ce qui cloche.
Le raisonnement développé par la FBF et Bonnafé est en trois points:
- De nouvelles règles prudentielles imposent aux banques d'avoir plus de fonds propres. De nouvelles taxes sont apparues depuis 2008 (taxe systémique, taxe française sur les transactions financières et contribution pour financer l'ACP et l'AMF): ce sont autant de contraintes supplémentaires qui pèsent sur les banques.
- A cause de ces contraintes, la rentabilité des banques diminue. Cela se traduit par une baisse du return on equity (ROE), c'est-à-dire du ratio entre les bénéfices et le montant des fonds propres.
- Les banques gagnant moins d'argent, elles financent moins l'économie, c'est-à-dire qu'elles distribuent moins de prêts aux entreprises. Ce qui a pour effet une moindre croissance du PIB.
Comment Bonnafé dit ça? D'abord, en faisant un calcul étrange sur la pression fiscale, ensuite en faisant directement le lien avec la capacité des banques à financer l'économie:
"Pour le secteur bancaire, tous impôts et taxes confondus, le taux
d’imposition s’est élevé en 2012 à 63 %. Après la surtaxe de l’impôt sur
les bénéfices des sociétés qui vient d’être décidée, il atteindra
quasiment 65 % en 2013. Ce niveau est trop élevé, c’est un fait. Le taux
d’imposition de BNP Paribas, est encore plus important : 3 points
au-dessus de la moyenne. Il s’établissait à 66 % en 2012 et passera à
68 % cette année. Deux tiers de prélèvements, ce n’est pas supportable.
C’est 18 points de plus que la moyenne des entreprises en France et sans
équivalent en Europe. A de tels niveaux, un secteur
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