Ils espèrent parvenir à sensibiliser dans la dernière ligne droite des parlementaires contre cette réforme dite du « ministère fort » qu'ils ont rebaptisée réforme du « ministère mort ». Passée inaperçue dans le brouhaha médiatique, ce chamboulement inédit de l'organisation territoriale du corps de l'inspection du travail ainsi que de ses pouvoirs – derrière lequel se cache Jean-Denis Combrexelle, l'inamovible directeur général du travail sous la droite en poste depuis 2002 –, est « une mise à mort de l’inspection du travail française », accusent les syndicats. Ils organisent, à la veille de l'examen du texte devant l'assemblée, un grand meeting à la bourse du travail à Paris le lundi 27 janvier pour « alerter sur la casse » de ce qui constitue l’un des derniers remparts des salariés face au rouleau compresseur patronal.
Dissimulé dans le volumineux et complexe projet de loi relatif à la formation professionnelle, l'emploi et la démocratie sociale, qui prévoit également la suppression des élections prud'homales (lire ici notre article) et que le gouvernement veut voir voté au plus vite avant la trêve parlementaire de fin février en raison des municipales, le « plan Sapin » est massivement rejeté en interne. « Nous réclamions une réforme, de nouveaux moyens, de nouveaux effectifs, mais pas une mise à mort que même la droite n’aurait pas osé faire », confie un inspecteur du travail francilien « écœuré » qui espérait un doublement des effectifs tant les sections sont à flux tendu. La France ne compte encore qu’un inspecteur ou contrôleur du travail pour 10 000 salariés, un ratio fort médiocre qui laisse plusieurs longueurs d'avance aux délinquants en col blanc dans les entreprises…
© @dr
Pas une seule des organisations syndicales de l’inspection du travail n’a voté pour cette réforme lors du comité technique ministériel. La CFDT (17 %) et l’UNSA (14 %), qui représentent un tiers des agents, se sont abstenues. Les autres qui représentent deux tiers du personnel (CGT, FSU, SUD, FO, CNT, CFTC) ont voté contre. Non pas que la majorité des 700 inspecteurs et 1 500 contrôleurs du travail soient « rétifs ''au changement, c'est maintenant'' », « corporatistes », comme le ministère peut les décrire, s'insurge Pierre Meriaux, délégué syndical SNU-TEFE-FSU. Mais parce que derrière le bel habillage – « renforcer les pouvoirs de l'inspection » –, et sous couvert d'une revalorisation de certains métiers et de quelques avancées, les syndicats voient dans cette réforme plusieurs attaques dangereuses à l'institution et à la fonction d'inspecteur du travail ainsi qu'une désorganisation du travail « pathogène, lourde de souffrance au travail ». « Des attaques jamais vues », disent-ils, depuis la création de cette institution il y a 121 ans – au départ pour protéger les femmes et les enfants avant de devenir un élément fondamental de la protection des salariés.
via www.mediapart.fr