"Lundi en histoires. Une division SS en France, das Reich", ce soir sur France 3 à 20 h 50. À partir d’images d’archives, Michaël Prazan raconte l’histoire de la division SS responsable du massacre d’Oradour-sur-Glane, en juin 1944. Mais aussi de nombreux autres massacres à l’est de l’Europe, comme en Biélorussie, où il y eut dès 1942 l’équivalent d’un Oradour tous les deux jours.Vous avez réalisé en 2009 un documentaire, Einsatzgruppen, les commandos de la mort, sur ces SS qui ont assassiné des milliers de juifs en Ukraine. Vous présentez, ce soir, un film sur la division Das Reich, responsable des massacres de Tulle et d’Oradour-sur-Glane, qui a aussi participé activement aux massacres biélorusses. D’où vous vient cet intérêt pour cette période de l’histoire ?
Michaël Prazan Je viens d’une très nombreuse famille, juive polonaise, qui a été intégralement massacrée. Mon père et sa sœur, les seuls survivants, ont dû la vie à la résistance communiste du Limousin. J’ai été marqué par cette histoire. Ma première image des Einsatzgruppen, je la dois au feuilleton Holocauste : j’avais dix ans, je le regardais avec mes parents. Et j’ai vu ces gens debout devant des fosses, d’abord habillés au début, et puis rapidement nus, et assassinés. Je ne crois pas que mes parents connaissaient ce pan de l’histoire. D’ailleurs, je me suis rendu compte que l’Occident en général ignorait ce qui s’était passé. On était encore alors très isolés du monde soviétique, il y avait une vraie rupture géographique et historiographique. Quand je suis devenu réalisateur, je n’avais qu’une idée en tête, c’était de raconter cette histoire. Mais je ne m’en suis senti capable qu’après mon deuxième film. Ça a été un travail terrible, très difficile, très éprouvant. Les séjours de tournage à l’Est, en Ukraine, ont été assez traumatisants.
Parce que les lieux sont dévastés ? Ou parce que vous avez été confronté, aujourd’hui encore, à l’antisémitisme ?
Michaël Prazan Le pays est un choc, déjà, car on y prend la mesure de cet immense cimetière à ciel ouvert. On y ressent un malaise permanent. Et la guerre n’est pas une histoire résolue : les vieux vivent avec l’idée que les nazis sont encore là, et que les Soviétiques existent encore. On y côtoie aussi un antisémitisme, un néofascisme très forts. En Galicie, il y a même une réhabilitation des divisions SS ukrainiennes. Je suis revenu assez miné. Mais le film a réalisé une magnifique audience, en France, et a été le programme le plus apprécié qualitativement de l’année.
Et l’histoire de la division Das Reich s’inscrit dans le même projet ? Vous racontez tous les massacres perpétrés sur son chemin, en Europe, dans l’est et dans le sud…
Michaël Prazan Elle m’a toujours intéressé. Quand j’ai écrit les Einsatzgruppen, j’ai dû éplucher presque tous leurs rapports journaliers. Et je suis tombé sur des rapports de la division Das Reich. Avec les bilans chiffrés du nombre de juifs exécutés par cette division, notamment en Biélorussie mais pas seulement. Je savais déjà, à l’époque, que la Das Reich était responsable du massacre d’Oradour-sur-Glane. J’ai voulu essayer de montrer qu’Oradour est une continuité de la Biélorussie. Pour tenter de comprendre, il fallait inscrire ce qui s’est passé dans un temps un peu plus long, et dans une géographie un peu plus étendue. Car ces massacres répondaient à un modus operandi, dont la régularité est frappante : les SS rassemblent tout un village, divisent les femmes et enfants des ho
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