Gaspar Miklos Tamas: « La Hongrie d’Orbán est un mélange de Pétain et de Salazar» | Mediapart

Mediapart. Comment analysez-vous ce qui se passe en ce moment en Hongrie ?

Gaspar Miklos Tamas. C’est une combinaison de choses. Le paradoxe principal est que ce gouvernement lutte contre le capital international pour avoir le droit, souverainement et indépendamment, de conduire la même politique que celle exigée par ce même capital ! Le contenu social ou économique du gouvernement Orbán est néo-libéral, avec un impôt à taux unique, avec l’accent mis sur la classe moyenne, avec la fin de l’aide sociale, etc. Tout cela est très orthodoxe et néo-libéral. Mais le gouvernement insiste pour le faire à sa manière, et surtout en préservant un pouvoir indivisible et total sur la société hongrois sans immixtion étrangère. Pour certains observateurs étrangers, Orbán est un Chavez européen. Mais ce n’est pas vrai du tout ! Les politiques d’Orbán sont très conservatrices et bourgeoises.

GMT chez lui à Budapest. Janvier 2012.GMT chez lui à Budapest. Janvier 2012.© Thomas Cantaloube

Il y a une renaissance à la Madame Thatcher première période, des valeurs traditionnelles avec une Constitution qui interdit le mariage gay, et quelque chose dont la presse internationale parle très peu : une attaque très forte contre les syndicats et les droits sociaux. C’est impossible de faire grève, les privilèges des syndicats ont été abolis, des centaines de permanents syndicaux ont perdu leurs emplois.

C’est l’introduction d’un État autoritaire, que je ne nommerai pas dictature, où toutes les branches de l’État sont dirigées directement par l’exécutif.

Nous sommes ici en Europe centrale où la culture a au moins une importance symbolique. Or nous assistons à une attaque extraordinaire contre l’intelligentsia. Contre les philosophes, dont votre serviteur, contre le théâtre, contre la cinématographie hongroise qui a été abolie – elle était très étatique comme en France ou en Italie, mais cette année, il n’y a eu aucun florint déboursé pour le cinéma hongrois. On a arrêté les subventions pour le festival Orchestra de Budapest, le meilleur orchestre symphonique du pays.

Une attaque contre la recherche, contre les universités, contre l’éducation dans les lycées qui revient sous le contrôle de l’Église catholique… C’est l’attaque sur tous les fronts contre les diverses autonomies.

Tout ce que vous décrivez s’est produit en moins d’un an et demi. Comment ce gouvernement a-t-il été capable de tout bouleverser aussi vite ?

Parce qu’il a gardé tout son programme secret avant l’élection. Cela a été, pour moi qui observe attentivement la vie politique, une surprise totale. Personne n’était préparé à cela. La règle des deux tiers (pour les amendements à la Constitution) avait été établie pour instaurer une forme de consensus. Mais Fidesz (le parti d’Orbán) a utilisé ce pouvoir de manière très grossière. D’abord avec 17 amendements à la Constitution, puis carrément une nouvelle Constitution.

Même la législation se fait d’une manière neuve. Les lois les plus importantes sont présentées par des députés individuels du Fidesz, et non pas par le gouvernement, ce qui permet d’aller beaucoup plus vite et sans débats. Une loi peut être votée en dix minutes dans ces conditions. Ces députés présentent d’un jour sur l’autre des lois de 130 pages. Ils semblent que Fidesz soit arrivé au pouvoir avec des colis pleins de nouvelles lois préparées à l’avance ; et que personne n’a eu le temps d’examiner avant qu’elles ne soient soumises au Parl

via www.mediapart.fr

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