Dans le courant de sa campagne présidentielle ou dans les mois qui ont suivi son accession à l'Élysée, on a pu, par moments, s'interroger sur la filiation dans laquelle voulait s’inscrire François Hollande. Allait-il être un réformiste de gauche, à la manière du Lionel Jospin des années 1995-1997 ? Un instant, on a pu le croire, puisqu’il a fait comprendre que son ennemi, c’était la finance. Ou alors, allait-il être un social-libéral et suivre la voie ouverte en France à la fin des années 1990 par Dominique Strauss-Kahn ou Laurent Fabius ? Peu après l’alternance, on a pu tout aussi bien le penser puisque, oubliant derechef toutes ses promesses des mois passés, il a conduit avec zèle une politique pro-patronale, déréglementant un jour le marché du travail, dynamitant le lendemain l’impôt sur les sociétés pour offrir aux chefs d’entreprise un « choc de compétitivité »…
S’il faut inscrire François Hollande dans une filiation historique, ce n’est pourtant pas à celles-ci qu’il faut en réalité se référer. Après que le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, eut pendant de longs mois, et avec l’assentiment du chef de l’État, mené une campagne de stigmatisation contre les Roms sur un registre xénophobe assez proche de celui de Brice Hortefeux ou de Claude Guéant sous le quinquennat précédent ; et après que le même François Hollande eut lui-même embourbé les socialistes dans un formidable discrédit, celui de la cafouilleuse et honteuse affaire Leonarda, on y voit maintenant un peu plus clair : s’il y a une filiation à établir, c’est plus vraisemblablement avec le mollétisme.
Guy Mollet et François Hollande
Pourquoi appeler Guy Mollet (1905- 1975) à la rescousse pour décrypter le quinquennat de François Hollande ? La réponse coule de source. L’ancien président du Conseil incarne dans l’histoire récente ce que le socialisme français a produit de pire. Dans le personnage, il y avait en effet les facettes de la mollesse, de l’indécision ou de la versatilité – un peu à la manière de ce que fut juste avant lui le petit Père Queuille (1884-1970), dont il fut d’ailleurs le bras droit en 1951, en qualité de vice-président du Conseil. Adepte des accords de circonstances dont la IVe République était friande, il a donc fluctué au fil des ans, dans un parcours sinueux, dont la démocratie a finalement failli périr. Tout comme la SFIO dont il a longtemps été la tête de proue.
via www.mediapart.fr