Plus empoisonnante que l’affaire Bettencourt, celle de Compiègne. Dans la première, Eric Woerth n’est que l’un des protagonistes qui auraient profité de la milliardaire ; dans la seconde, l’ex-ministre serait le seul maître d’œuvre (entre octobre 2009 et mars 2010, juste avant de passer du Budget au Travail) de la privatisation d’un hippodrome qu’aucun impératif d’intérêt général ne commandait.
La polémique a un temps porté sur le prix : 2,5 millions d’euros permettant à la Société de courses de Compiègne (SCC), locataire depuis cent cinquante ans, de devenir propriétaire. Puis sur le fond même de la vente : Woerth avait-il le droit de vendre (aliéner, dans le jargon public) un terrain en lisière d’une forêt domaniale ? Jean-Louis Nadal, procureur général de la Cour de cassation, vient de saisir la commission d’instruction de la Cour de justice de la République (CJR), première étape avant un éventuel renvoi de Woerth. Nadal reste circonspect sur la prise illégale d’intérêt, car rien ne démontre que Woerth aurait personnellement bénéficié de la privatisation. Sa proximité avec le turf est proverbiale, en tant que maire de Chantilly (haut lieu hippique de l’Oise), son épouse étant actionnaire d’une écurie. Mais cela ne relève que de relations sociales. En revanche, le plus haut procureur de France estime que «des documents sont susceptibles de constituer des indices de favoritisme», qui ne suppose pas de renvoi d’ascenseur.
Nadal avait été saisi cet été par l’écologiste Corinne Lepage, puis par le socialiste Christian Bataille pour activer la saisine de la CJR. Ce dernier vient en plus de porter plainte au pénal afin d’élargir l’affaire à d’autres protagonistes ne relevant pas de la CJR – comme Philippe Marini, sénateur-maire UMP de Compiègne, ou Antoine Gilibert, promoteur immobilier et président de la SCC. Objectif proclamé : obtenir l’annulation de la privatisation de l’hippodrome et son retour dans le giron public. L’hypothèse est en effet mentionnée dans le contrat de cession : «Il y a lieu à résiliation si l’on a compris dans la vente un bien non susceptible d’être vendu.» Ce pourrait bien être le cas. Explications.
L’hippodrome est-il en forêt ?
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