De quoi la mondialisation est-elle le nom ? L’engagement d’Andre Bellon, Roland Gori & Philippe Petit

Alors que le président de la République s'apprête à proposer, avec la «règle d'or» une nouvelle défaite du politique subordonnée à la gestion comptable des affaires publiques, André Bellon (1),
Roland Gori (2) et Philippe
Petit (3) en appellent à une pacifique «guerre d'indépendance par rapport à la
colonisation par le capitalisme financier de tous les champs de l'existence,
bien au-delà du champ de l'économie.»

 

 

Au
cours de ces dernières années, de nombreux collectifs, professionnels, citoyens, ont manifesté
leur colère et leur chagrin face aux conséquences désastreuses des réformes
gouvernementales actuelles entreprises au nom de la rationalité comptable et de
la logique de performance. Ces professionnels exigent de retrouver leur dignité
dans la pratique de leurs métiers mise à mal par les valeurs néolibérales et
les dispositifs d'évaluation généralisée. La LOLF, la RGPP, les conséquences du
Traité de Lisbonne, conduisent non seulement à une recomposition des conditions
matérielles
de l'exercice des métiers, au démantèlement des services publics par la
restriction budgétaire, mais encore à une transformation symbolique de leurs missions
d'utilité publique en prestations de services rendus, tarifés sur le modèle des
entreprises commerciales ou industrielles. Il s'agit dans tous les cas
d'inciter par tous les moyens matériels et symboliques à ce que les
professionnels du soin, de l'éducation, de la recherche, du travail social, de
la justice, de la police, de l'information, de la culture, ne puissent pas
penser leurs actes autrement que sur le modèle de la marchandise, du produit
financier et des services tarifés[4].
Cette injonction à devoir concevoir les actes professionnels sur le seul modèle de la pensée
néolibérale, de ses catégories symboliques et matérielles, participe à une
véritable civilisation des mœurs au sein de laquelle l'humain se réduit à un
« capital
[5] »,
un stock de ressources qui à l'instar de la nature doit être exploitée à
l'infini.

Les
coupes budgétaires dont les services de l'État sont préférentiellement l'objet
en transforment la nature, sa structure et ses missions. Les nouvelles formes
de l'évaluation des pratiques professionnelles constituent le versant
symbolique de cette transformation et se voient depuis le début des années 1990
de plus en plus confiées à des cabinets d'audit privés, et plus récemment à des
agences d'évaluation construites sur le même modèle. Cette « nouvelle
manière de donner des ordres[6] »
par l'expertise est le corollaire obligé des coupes budgétaires, elle en est l'équivalent
symbolique
.
Cette normalisation des pratiques propres aux sociétés de contrôle et de
défiance d'allure démocratique, tend à transformer les professionnels en outils
d'un pouvoir politique qui traite l'humain en instrument, en « segment
technique » comme disait Jaurès.

Cette
civilisation des mœurs n'est pas propre à la France, initiée d'abord dans les
années 1980 dans le monde anglo-saxon, cette « nouvelle culture du
capitalisme financier » s'est globalisée. Là est le véritable
problème. On ne saurait aujourd'hui combattre cette normalisation néolibérale
des pratiques et des mœurs sans prendre la mesure que c'est bien sur la scène
de la mondialisation qu'elle se joue et dont elle prétend tirer sa légitimité. C'est encore une fois
de la globalisation d'une certaine culture et d'une certaine vision du monde
que s'autorisent et se légitiment aujourd'hui les abus de pouvoir qui ne
permettent pas à un citoyen ou à un peuple  de se concevoir autrement que comme « un homme
économique ». Que
ce soit le classement de Shangai, l'évaluation des agences de notations
fi

via blogs.mediapart.fr

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