Eli Zaretsky en est convaincu : les États-Unis sont aujourd’hui confrontés à une nouvelle crise systémique. « Si Obama avait tenu les promesses implicites de sa campagne, nous serions confrontés aujourd’hui à la classique tension entre libéralisme et gauche qui caractérise les grandes époques de réforme aux États-Unis. Au lieu de quoi le nouveau président a choisi d’occuper l’espace stérile d’un “centre” bipartisan ; inévitablement, le pays a été pris en otage par la droite et ses alliés capitalistes, ce qui n’a fait qu’approfondir la crise. Il ne sera pas facile de tourner le dos au premier président noir des États-Unis, mais il nous faudra le faire si nous voulons vraiment progresser. »
Et Zaretsky d’appeler les progressistes, les libéraux, les féministes, les écologistes, etc., à se joindre aux activistes d’Occupy Wall Street, qu’il estime être le mouvement le plus à même de porter dans cette nouvelle crise « l’idéal égalitaire de la nation américaine ».
Christophe Deroubaix, dans son « Dictionnaire presque optimiste des États-Unis », estime lui aussi que le pays traverse une des phases transformatrices de son histoire et que la gauche y a son mot à dire. Journaliste à L’Humanité, il parcourt le pays depuis une quinzaine d’années, durant lesquelles il a toujours laissé son instinct de reporter prendre le pas sur les discours préformatés et l’idéologie d’une partie de la gauche de la gauche française qui refuse de regarder ou qui plaque des discours tout fait sur la réalité nord-américaine.
À force de voir et d’apprendre des choses sur place qui ne correspondent pas à la perception d’une partie de ses « camarades » en France, Deroubaix a choisi d’écrire son petit dictionnaire en forme d’argumentaire à opposer aux sceptiques et à ceux qui sont persuadés que les États-Unis sentent le soufre, comme l’avait déclamé Hugo Chavez à la tribune de l’ONU.
En dressant les portraits de figures progressistes américaines majeures mais méconnues sur le versant oriental de l’Atlantique (le syndicaliste Eugene Debs, l’intellectuel noir W.E.B. Dubois) ; en confrontant, enquêtes d’opinion à l’appui, les notions de classes moyennes ou de rêve américain à leur réalité ; en rapportant des événements récents passés inaperçus (des syndicalistes qui ont pris le pouvoir au conseil municipal de New Haven, la mesure R qui a été approuvée à Los Angeles pour financer les transports publics grâce à une hausse des taxes) ; ou en décrivant des tendances lourdes de ces dernières décennies (la baisse du nombre d’exécutions capitales, l’augmentation des mariages mixtes), Christophe Deroubaix dresse le tableau d’un pays dérivant vers des rivages plus progressistes.
Là où Zaretsky raconte comment la gauche a fait pencher la balance en faveur de plus d’égalité au cours des différentes crises traversées par les États-Unis, le journaliste de L’Humanité analyse comment, aujourd’hui, l’accroissement des inégalités pousse les citoyens ordinaires, dépolitisés, vers la gauche.
« Les États-Unis arrivent en bout de cycles. Au pluriel, oui. Le moment est justement singulier pour cette raison », écrit Deroubaix dans son introduction. « Le premier cycle qui prend fin est celui d’une hégémonie de la puissance américaine dans un monde dominé par les pays dits occidentaux. Le plus probable est que l’Amérique de demain sera l’une des puissances d’un monde multipolaire. La seconde est celui d’une nation “européenne”, blanche, protestante et anglo-saxonne. Le certain est que l’Amérique de demain sera démographiquement sa
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