Les journalistes santé sont-ils des vendus ? Christian Lajoux, président du Leem, syndicat des entreprises du médicament, parle de liens « réguliers », mais pas « étroits » entre la presse et l'industrie pharmaceutique.
En réalité, la presse professionnelle est infiltrée par les laboratoires, qui assurent sa survie par la publicité. C'est moins connu, les médias grand public sont également sous influence.
« Les labos essaient de nous faire animer des table rondes, ce sont des missions très bien rémunérées. Il y a ceux qui refusent, comme moi, les précaires qui ont besoin de compléter leurs fins de mois, et ceux qui n'hésitent pas à mélanger les genres », raconte un journaliste (vertueux) en charge de la santé dans un grand quotidien.
Selon Eric Giacometti, auteur du livre d'enquête « La Santé publique en otage » (éd. Albin Michel, 2001), dans le secteur, les journalistes ne sont pas nombreux à être complètement « clean ». Difficile de résister aux labos. Au moment de la sortie de son livre, le prix pour l'animation d'un congrès sur deux jours équivalait à une fois et demie le salaire d'un journaliste.
C'est ce qu'on appelle des « ménages ». Plus grave, les « médecins-journalistes », qui prennent la parole sur des médias généralistes et grand public tout en étant particulièrement proches de l'industrie pharmaceutique. Ils en sont des quasi salariés et comme ils n'ont pas de carte de presse, ils ne voient pas où est le problème.
Voici trois exemples, parmi les plus emblématiques.
► Jean-François Lemoine (Nouvel Observateur, France Info)
Jean-François Lemoine, chroniqueur au Nouvel Observateur et sur France Info, était encore le propriétaire et PDG de MVS-Productions, il y a deux mois. Il a vendu la société qu'il a créée à Publicis, parce qu'elle avait un bilan déficitaire – il continue d'y travailler.
MVS est une boîte de production de films institutionnels et publicitaires pour les laboratoires. Elle édite aussi plusieurs sites internet, avec le soutien financier de l'industrie pharmaceutique. Comme Diabete2-patients, un site destiné aux diabétiques financé par Servier Médical. Un confrère interroge :
« Que penser alors quand depuis un congrès de cardiologie à Munich [où les frais de déplacement sont pris en charge par MVS, ndlr], il fait sur France Info une chronique pour vanter les effets du Procoralan, la dernière merde de Servier ? »
Jean-François Lemoine ne se souvient pas de cette chronique. Il assure ne jamais citer le nom des médicaments à l'antenne (seulement les molécules) et rappelle qu'il présente son programme en duo avec Jea
via www.rue89.com