Arrêt sur images – « Ne laissons pas Le Pen polluer le débat sur la démondialisation »

Il y a à peine plus d'un an sur notre plateau, Frédéric Lordon prenait les paris : 12 à 18 mois plus tard, la Grèce serait encore dans une situation de crise. Il avait vu juste. Pourquoi? "Les ajustements budgétaires ne peuvent fonctionner que sous certaines conditions", explique-t-il : détente des taux d'intérêt, dévaluation de la monnaie et contexte de croissance économique. Or, "aucune de ces conditions n'a été remplie". "On pouvait évidemment le prévoir", approuve Thomas Coutrot. Ce qui "atterrant", "sidérant", c'est de voir tous "ces grands économistes qui ont cru que ça allait marcher" !"

Mais le fonds de stabilité européen de 750 milliards, annoncé à grands renforts de cymbales, alors ? Il monte en puissance, mais son mécanisme revient surtout à transférer les dettes que la Grèce a contracté envers des investisseurs privés vers les contribuables de tous les pays européens, décortique Coutrot. Et si "un gros pays se présente au guichet", explique Lordon, le système n'est plus viable, "il saute comme un bouchon de champagne". L'Espagne, qui contribue pourtant au fonds, pourrait avoir très bientôt besoin de cette aide… Seul point positif pour nos deux invités : les manifestations en Grèce et en Espagne fonctionnent, au moins un peu. La "résistance du corps social" (dixit Lordon) permet de signifier aux marchés que la rigueur a une limite. (acte 1)

Question quasi-rituelle sur notre site : Quel est le rôle exact de l'Allemagne dans la saison 2 de cette crise grecque ? Pourquoi Angela Merkel s'est-elle tout à coup opposée à la Banque centrale européenne, en clamant qu'elle voulait que les banques privées acceptent que la Grèce réduise aussi une part de ses dettes envers elles ? Pour le co-président d'Attac, l'opinion publique allemande refuse de prendre seule le risque d'un défaut de paiement grec. "Le discours des autorités allemandes est complètement désarticulé", souligne tout de même Lordon, pour qui deux pays cohabitent : une Allemagne tendance Banque centrale, qui ne veut pas que les banques payent, et une Allemagne tendance contribuable, qui ne veut pas porter le chapeau.

Autre question, en apparence simple, d'Anne-Sophie : qui détient la dette grecque ? Très bonne question, à laquelle Coutrot assure ne pas avoir de réponse. Lordon, lui, semble plus sûr de lui, mais reconnaît qu'il manque une vraie "cartographie du risque systémique", qui montrerait quelle banque a des intérêts dans quelle autre banque. Qui prête à qui ? A quel niveau ? Ces informations permettraient d'anticiper les risques majeurs. Mais il serait très compliqué d'essayer d'établir cette cartographie, les produits financiers étant complexes, et surtout, très mouvants dans le temps. (acte 2)

Heureuse surprise pour Lordon : la démondialisation s'invite dans les JT ! Le 20 heures de France 2 s'est intéressé (et plutôt bien) à l'idée, défendue depuis peu par le socialiste Arnaud Montebourg. Aussitôt, comme pour mieux expliquer ses réticences face à l'idée, Coutrot explique: "l'histoire nous a forcé à nous rendre compte qu'on ne peut pas tout traiter au niveau national". Notamment les questions politiques et, première d'entre elles, l'écologie. Surtout, il s'oppose à toute "décision unilatérale" allant contre les pays en développement, comme la mise ne place de barrières douanières.

Lordon répond en soulignant qu'il s'agit avant tout, et presque uniquement, de démondialisation économique.

via www.arretsurimages.net

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