Le tribunal administratif de Poitiers est formel : en niant l'existence d'un dossier constitué sur un magistrat, la hiérarchie judiciaire et le ministère de la Justice ont menti. Le magistrat en question est Jean de Maillard, blogueur sur Rue89 et spécialiste reconnu de la criminalité financière. Muté, il affirme payer pour son indépendance. Le comportement de la chancellerie ne plaide pas en sens inverse.
Le 20 août 2010, Jean de Maillard publiait sur son blog une lettre ouverte à la garde des Sceaux d'alors, expliquant pourquoi la fin de ses fonctions de président du tribunal correctionnel d'Orléans était une sanction, de son point de vue.
Depuis la nomination de son supérieur hiérarchique, le président du tribunal de grande instance (TGI) d'Orléans, à la fin 2009, Jean de Maillard était critiqué. Pour des histoires de congés, pour des jugements renvoyés, pour avoir relevé à l'audience des erreurs dans le travail du parquet.
« Je relaxe quand les violences sur policiers sont bidons »
Selon lui, c'est parce qu'en tant que président du tribunal correctionnel, il faisait preuve d'indépendance par rapport à la soumission ambiante à la pression hiérarchique (qu'il résumait par ailleurs sur son blog au moment de la crise des magistrats ) :
« Je soulève des questions prioritaires de constitutionnalité sur la garde à vue [jugée non conforme au droit européen, ndlr], j'annule des procédures quand il y a des irrégularités, je prononce des relaxes pour des prévenus de violences sur des policiers qui sont bidons. »
Quand un article de La République du Centre se fait l'écho de « tensions palpables entre juges du siège et magistrats du parquet », le 25 février 2010, le président du TGI, Gilles Maguin, convoque Jean de Maillard. La rencontre dure plus de deux heures, en présence d'un troisième magistrat qui note les échanges, à la demande de Maillard.
Place Vendôme, « pas de commentaire » sur cette affaire gênante
Dans la bouche du patron du TGI, un discours apparemment conciliant enrobe un tissu d'amalgames basé sur des « ragots », selon Jean de Maillard. Quant à l'interview donnée au même journal local le 3 septembre 2010 par le grand patron de la juridiction, le premier président de la cour d'appel d'Orléans, Daniel Tardif, elle contient « des propos parfaitement diffamatoires », explique le juge muté.
Impossible d'avoir l'avis de la hiérarchie judiciaire : le cabinet du garde des Sceaux a refusé de faire le moindre commentaire sur cette affaire.
Une affaire plutôt gênante, puisque la justice administrative a donné raison à un simple juge contre l'appareil de la justice judiciaire tout entier.
Depuis le début, en se basant sur des déclarations de Gilles Maguin, Maillard affirme que celui-ci a constitué un « dossier parallèle ». « Parallèle » car officiellement, aucune sanction disciplinaire n'a été prise contre lui. La hiérarchie, depuis le président du TGI
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