Stanislas Dehaene nous a-t-il donné le « code de la conscience » ? Par Clément Dousset

Le livre au titre choc de Stanislas Dehaene annonce un ouvrage marquant. Et « Le Code de la Conscience » publié fin 2014 aux éditions Odile Jacob est à n'en pas douter un traité scientifique de poids dans le domaine de la neurobiologie. C'est aussi un essai philosophique d'envergure à l'ambition claire et dès l'abord dévoilée. Savoir si cette ambition a atteint son but, c'est une autre question.

 Un traité substantiel

Le traité nous fait cheminer avec clarté dans des ténèbres qu'on a pensé très longtemps impénétrables : le mystère de la conscience présente. L'I.R.M. (imagerie fonctionnelle par résonance magnétique), l'EEG (électroencéphalographie) et la MEG (magétoencéphalographie) sont les phares de cette exploration que permet encore d'étendre la pose de fines électrodes à l'intérieur du tissu cérébral. Ainsi peuvent être visualisées toutes les réactions du cerveau liées à la présentation à un sujet de stimulus sensibles. Par un protocole d'expérience ingénieux, Dehaene et son équipe ont pu ainsi comparer les réactions du métabolisme cérébral en fonction de stimulus principalement visuels qui entraînaient ou non une perception consciente chez un lot de patients. Ils ont ainsi mis à jour que certains stimulus, brefs et « masqués », dont on pouvait suivre l'effet à la trace jusque dans le cortex supérieur et dont les réactions du sujet témoignaient qu'ils avaient été compris pouvaient ne pas entraîner d'expérience subjective. En un mot que le cerveau pouvait enregistrer l'information contenue dans une image, la présentation d'un nombre par exemple, sans que le sujet ait eu conscience d'avoir vu l'image. Ils ont ainsi établi assez clairement l'existence d'un fonctionnement cérébral inconscient qui pouvait même être lié à l'élaboration de la pensée abstraite.

 

Par contraste, ils ont pu discerner dans l'activité neurale induite par des stimulus qui font accéder à des perceptions conscientes ce que Dehaenne appelle les « signatures d'accès à la conscience ». La première est un « embrasement » de nombreuses régions du cortex où les neurones entrent en forte activité. Cet embrasement est aussi assimilé à une « avalanche » car l'activation ne cesse de s'amplifier, de gagner en force au fur et à mesure de sa progression. A partir de ses expériences sur la perception d'une image, Dehaene met en lumière l'existence d'une seconde « signature », l'onde P300. 300 millisecondes après l'apparition du stimulus, une intense onde d'électricité positive parcourt en effet le cerveau de l'arrière vers l'avant. Une troisième signature de la conscience se manifeste par une longue activité de haute fréquence proche de l'activité gamma (40 Hertz). Enfin, et ce serait là une quatrième signature de la conscience, il y a une synchronisation massive des signaux électromagnétiques du cortex, les neurones appartenant à des régions cérébrales très éloignées se mettant à osciller dans la même bande de fréquence.

 

Connaître les « signatures » de la conscience ne manque pas d'avoir des applications pratiques d'importance majeure que Dehaene détaille aux chapitres 6 et 7 (« l'heure de vérité » et « l'avenir de la conscience »). Il montre en particulier comment le repérage de l'onde P300 peut permettre de distinguer pour les patients dans le coma ceux qui sont dans un état végétatif et ceux qui sont dans un état de conscience minimale alors que le diagnostic médical n'est souvent pas déterminant. Des questions jusqu'alors vivement débattues comme la présence ou l'absence de conscience chez le très jeune enfant paraissent en passe d'être tranchées : la conscience serait contemporaine de la naissance. Un test de la conscience auditive mis au point par Dehaene et son équipe a perm

via blogs.mediapart.fr

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