Robespierre est-il toujours notre contemporain ? | L’Humanité

Les faits. L’assassinat de Maximilien de Robespierre, 
le 10 thermidor de l’an II (28 juillet 1794), a été commémoré cette année dans la plus grande discrétion. le contexte À l’occasion de la rencontre-débat sur 
« la Révolution, Robespierre et l’Allemagne », qui se déroulera samedi et dimanche au Théâtre de la Commune d’Aubervilliers, centre dramatique national, l’Humanité 
ouvre ses colonnes aux historiens qui l’animeront.

Michel Biard Professeur d’histoire du monde moderne et de la Révolution française à l’université de Rouen, président de la Société des études robespierristes 
Sophie Wahnich Agrégée, docteure en histoire, directrice de recherche au CNRS 
Jean-Numa Ducange Historien, maître de conférences 
à l’université 
de Rouen

La commémoration de la mort de Robespierre, il y a eu 220 ans le 28 juillet 1794, a été traitée officiellement par le silence. Comment interprétez-vous ce fait ?

Michel Biard Comment pourrait-il en être autrement dans une République qui ne célèbre déjà pas la date de sa propre naissance, en septembre 1792, par une cérémonie officielle ? Qui plus est, commémorer la mort de Robespierre supposerait qu’on en finisse au préalable avec la légende noire qui accable sa mémoire depuis l’été 1794. Nous en sommes hélas très loin, comme en témoignent plusieurs querelles récentes à propos de son nom donné ou à donner à une rue. « Personnage trop controversé », telle est souvent la réponse qui est faite, en dehors de toute prise en compte des travaux des historiens et comme si nombre de nos rues et places ne portaient pas déjà des noms bien plus sujets à controverses. Dès lors, la question la plus urgente ne me semble pas de commémorer à chaque 28 juillet, mais de poursuivre un patient travail pour redonner à Robespierre sa vraie place dans la mémoire collective nationale. Plusieurs ouvrages récemment publiés devraient y contribuer, même si toucher un vaste public avec des travaux universitaires n’est jamais simple, tant l’accès aux médias de masse conditionne aujourd’hui le fait d’atteindre ou non ce public.

Jean-Numa Ducange Robespierre est toujours victime d’une légende, effectivement, qui fait de lui un monstre et un bourreau. Alors que Jean Jaurès est cité de façon unanime par tout le champ politique français – au prix de déformations historiques élémentaires parfois ubuesques –, la figure de Robespierre est devenue un repoussoir, sauf pour une partie de la gauche de la gauche, et encore. La Ville de Paris, y compris sa majorité actuelle, refuse obstinément de donner son nom à une rue. C’est assurément très révélateur du contexte dans lequel nous évoluons. Même s’il a toujours été l’objet d’attaques viscérales, un temps Robespierre pouvait bénéficier d’une certaine indulgence jusqu’aux rangs de la droite gaulliste, qui voyait en lui un sauveur de la France dans des circonstances difficiles, quand l’aspect social et politique était mis en avant par les publications proches des communistes. Le bilan de la Terreur et de ses responsables demeure controversé mais les accusations traditionnelles de « buveur de sang » et de « dictature » ne résistent pas aux analyses historiques sérieuses.

Sophie Wahnich Cette discrétion relève de la bienséance modérée dans une époque où le rapport à l’histoire vise à patrimonialiser des objets et des personnages qui permettent de maintenir le monde en l’état. Le personnage de Robespierre comme la séquence historique qui lui est le plus souvent associée, la Terreur, ne permettent pas ce régime d’historicité de la pruden

via www.humanite.fr

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