1,8 milliard de dollars (1,3 milliard d’euros) : c’est la somme totale d’avoirs détournés par des potentats, dictateurs, politiciens ou fonctionnaires corrompus, que la Suisse a confisqués puis restitués à leur pays d’origine depuis 2003. Un record si l'on compare ce chiffre aux 5 milliards de dollars de fonds spoliés rendus par toutes les autres places financières réunies.
Fonds Marcos (Philippine : 684 millions de dollars) ; fonds Abacha (Nigeria : 700 millions) ; fonds Montesinos (Pérou : 92 millions) ; fonds kazakhs 1 (114 millions) ; fonds Salinas (Mexique : 74 millions) ; fonds kazakhs 2 (48 millions) ; fonds Duvalier (en cours, Haïti : 5,7 millions)… La liste est longue et elle n’est pas close, puisque depuis le Printemps arabe et, plus récemment, la chute du président ukrainien Ianoukovitch, plus d’un milliard de francs suisses ont été bloqués. Le scénario est désormais bien rodé : une grande tolérance de la part des banquiers, avocats et autres intermédiaires tant que le pouvoir corrompu est en place, et une rapidité de réaction quand il est à terre, au nom de la sauvegarde de la « réputation » de la place financière helvétique. Au total, plus de trente procédures ont été menées contre des PEP (ces « personnes politiquement exposées ») depuis 1986. (Voir ici leur résumé.)
Autrefois coffre-fort imprenable des dictateurs et satrapes du monde entier, la Suisse peaufine son image. Et comme chaque année, le département fédéral des affaires étrangères (DFAE) s’est livré en juin à Genève à son traditionnel exercice de communication devant la presse : expliquer, chiffres à l’appui, combien la Suisse était formidable. Et dans ses pratiques et dans sa législation.
« La Suisse a longtemps été seule dans le collimateur. Aujourd’hui, cela a totalement changé. Le problème (des fonds spoliés) est un problème qui frappe toutes les places financières. Les gouvernements sont enfin d’accord pour régler la question ensemble », s’est réjoui Valentin Zellweger, le diplomate en charge de ce dossier, soulignant que depuis le Printemps arabe, la prise de conscience et les initiatives s’étaient multipliées à l’international. Ce qui rend d’autant plus précieux le savoir-faire helvétique. « Le G-8 s’est adressé à la Suisse car nous avons une certaine expérience dans ce domaine », ajoutait-il. (Voir ici son intervention devant le club suisse de la presse.)
via www.mediapart.fr