Quinze siècles de combats pour l’idéal d’une laïcité – Libération

Constantin et Théodose L’épée spirituelle et l’épée temporelle

L’idée de laïcité s’est forgée à partir d’une réalité marquante dans tout l’Occident : la collusion du politique et du religieux. Collusion qui se manifeste dès Constantin et Théodose à Rome, lorsqu’on décide que le christianisme sera l’unique religion d’empire et que, notamment après Théodose, au IVsiècle après J.C., on détruit toutes les bibliothèques de l’Antiquité. Une époque terrible où va se forger le thème des deux glaives. L’épée spirituelle et l’épée temporelle. Celle de l’excommunication, on exclut quelqu’un parce qu’il n’est pas dans la ligne. Celle de la sanction physique qui tue. L’Eglise va se doter d’une orthodoxie en dehors de laquelle il n’y a qu’hérésie, c'est-à-dire dissidence. L’hérésie arienne est la première réprimée, dès le IVsiècle : elle niait la divinité du Christ, considérant qu’il était un prophète, un homme inspiré par Dieu, et non pas Dieu lui-même incarné. Or l’Eglise interdit qu’on nie l’incarnation, qui distingue notamment le christianisme du judaïsme (Moïse n’est que prophète, il n’est pas Dieu incarné). L’autre grande hérésie est celle des Cathares, au XIIe siècle, également violemment réprimée : ils étaient accusés d’être des adorateurs du diable. Rappelez-vous l’ordre du légat du pape : «Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.»

Cette collusion va durer en gros quinze siècles, de la fin du IIIe siècle à la Révolution française. Quinze siècles d’extrême violence, liée au fait que la foi dicte la loi. Cela se traduit par la production d’une normativité religieuse dans les relations personnelles, la sexualité, la conception de la famille, les rapports entre l’homme et la femme. Les trois monothéismes ont toujours consacré la domination de l’homme sur la femme, sans doute parce qu’on vivait dans des sociétés patriarcales, et tout religieux qu’ils étaient, ils avaient tendance à sacraliser les préjugés d’une époque. Quand Dieu de la Bible dit à Eve : «Tes désirs te porteront vers ton mari et lui dominera sur toi», évidemment un croyant d’aujourd’hui peut se demander si c’est Dieu qui dit ça ou si ce sont les hommes qui attribuent leurs préjugés à Dieu.

Luther et Henri IV «Paris vaut bien une messe»

Huit guerres de religion en France après l’émergence du protestantisme et la critique des indulgences par Luther en 1517 vont conduire un roi, Henri IV, ancien protestant, à se convertir en 1593 au catholicisme par raison d’Etat et non par conviction. «Paris vaut bien une messe», aurait-il dit. Le summum de l’horreur est antérieur : le massacre de la Saint-Barthélemy, le 24 août 1572, ordonné par Charles IX et les Guise fanatiques, fait 3 500 morts à Paris (autant que les victimes des Twin Towers à New York).

L’acte d’Henri IV est une ouverture fondamentale : le roi se demande si une religion est indispensable pour qu’il y ait unité du royaume. Henri IV veut mettre un terme aux guerres de religion, et dans le sillage de Michel de L’Hospital, grand humaniste de l’époque, il rédige l’édit de Nantes. Un édit de tolérance, au sens où le roi, catholique, tolère, c’est-à-dire supporte – tolerare en latin signifie «supporter» – que certains de ses sujets soient protestants, qu’ils appartiennent à la religion qu’on appelait alors RPR (religion prétendue réformée). Cette tolérance institutionnelle implique cependant une inégalité. Les protestants ne tiennent pas leur liberté de culte de leur dignité d’homme qui doit être libre, ce que dira plus tard la Révolution française, ils la tiennent d’une autorisation donnée par le prince.

Louis XIV «Un roi, une loi, une foi»

La preuve qu’il s’agit bien d’une tolérance arrive un siècle plus tard quand Louis&nb

via www.liberation.fr

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