Quelle musique écoutait-on sous Alexandre le Grand ? | Rue89

Dans le cadre de l'exceptionnelle exposition orchestrée par Sophie Descamps sur le royaume de Macédoine, une petite partition déchiquetée est présentée. Laurent Capron, papyrologue de la Sorbonne, raconte :

« Au cours d'un inventaire en 2002, je l'avait trouvée roulée en boule dans une boîte à biscuits en ferraille avec un morceau de cigare et des journaux. Elle végétait dans les tréfonds du Louvre depuis plus de cent ans. Mais j'ai vite compris que c'était une merveille oubliée. »

Fragment de partition musicale sur papyrus, Médée de Carcinos le Jeune, musée du Louvre, Paris (Laurent Capron)

Spécialiste de la musique antique et archéologue de notre patrimoine sonore, Annie Bélis (CNRS, ENS) s'empare de la chose. Elle est une des rares érudites capable d'accéder aux partitions de l'époque, grâce à l'utilisation du traité d'Alypius. Ce texte du IVe siècle a beau être ardu, il vaut le détour. On le maîtrise seulement depuis la Renaissance. Il constitue désormais la pierre de Rosette donnant accès aux 1687 signes des tabulations musicales de l'antiquité.

Il a permis le décryptage du morceau. Or, ce « Sopalin usagé », comme dit Annie Bélis en souriant, est un trésor. C'est une Médée signée Carcinos le Jeune (d'environ 360 av. J.-C.), mentionnée par Aristote dans sa « Rhétorique », où l'héroïne, contrairement à la version du mythe véhiculée par Euripide, est innocente. On peut aujourd'hui, comme les Grecs du IVe siècle avant Jésus-Christ, écouter son aria envoûtant dévolu à une voix grave, les rôles de femme étant alors tenus par des hommes.


« Médée » par Carcinos le Jeune interprété par l'ensemble Kérylos

Une reconstitution miraculeuse d'instruments d'époque

Cithare romaine (Patrick Gaillardin)

Mieux : ces mélodies venues du fond des âges bénéficient également du concours des peintres et des sculpteurs de leur époque. Leurs témoignages renseignent sur l'aspect des instruments. Sans apport de subventions (ce qui est franchement décourageant quand on sait qu'il en coûte deux ans de travail et environ 20 000 euros), Annie Bélis a fait appel à un luthier pour reconstituer des cithares romaines, d'après la synthèse de nombreuses sources d'informations visuelles.

L'étude de sculptures d'Apollon jouant de la musique a permis d'en créer trois exemplaires d'excellente qualité sur lesquels jouent l'ensemble

via www.rue89.com

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Translate »
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x