C’est inédit, expérimental. Suffisamment nouveau pour retenir une quinzaine de militants socialistes frigorifiés un soir de la semaine, dans une salle municipale du XVIIIe arrondissement de Paris, mal chauffée. Emmitouflés dans des écharpes, les habitués de la section Jean-Baptiste Clément n’en perdent pas une miette. C’est la première réunion dédiée à l’organisation de la primaire. Tout est à inventer. Tout est à prévoir. C’est divertissant. Presque au point d’en oublier la guerre des chefs. Pour une fois, pas de motions, pas de courants. «Ici, il y aura un représentant de chaque candidat et le moment venu nous aurons des choix différents. Pour l’instant, cela ne nous empêche pas de faire le boulot», espère Jean-Philippe Daviaud, le secrétaire de la section qui compte 580 membres. Cela ressemble à une tentative de faire collectif, comme une réparation après les épisodes sanglants du congrès de Reims. «Je suis persuadée que ces primaires vont bousculer plein de choses, s’enthousiasme une jolie fille. A nous d’être innovants.»
Martine Aubry a donné le top départ, il y a quinze jours. Le calendrier est arrêté : dépôt des candidatures entre le 28 juin et le 13 juillet, vote les 9 et 16 octobre. François Lamy, bras droit de la première secrétaire, a présenté les étapes à la presse en début de semaine. «On rentre dans la phase active de préparation. Et il faut s’y prendre maintenant», assène Jean-Philippe Daviaud, en aimable chef de troupe. Vu l’ampleur de la tâche, il n’a pas tout à fait tort. Les questions fusent. A ce stade, peu de réponses. Ce soir de janvier, on en discute très librement, «à bâtons rompus».
12 000 bureaux de vote
C’est ici même qu’un samedi matin de décembre, une quarantaine de militants a simulé un vote de primaire, avec des jeux de rôle écrits à l’avance à Solférino. Ils ont joué la petite vieille qui ne trouve pas ses lunettes, l’alcoolo qui raconte sa vie, celui qui refuse de payer son obole d’un euro, ou n’a pas de monnaie… Dans une «ambiance de kermesse», selon une participante, tout a été chronométré : un vote prend entre cinq et sept minutes. Il y a du travail pour transformer ce casse-tête logistique en succès démocratique. La section Jean-Baptiste Clément, comme les 3000 autres de France dont Martine Aubry rencontrera les patrons le dimanche 30 janvier, a quelques mois pour concocter ses réponses. Une manière pour le Parti socialiste de retrouver sa dignité là où elle a été perdue : dans ses propres urnes.
«C’est l’urgence : il faut déterminer les lieux de vote», déroule Jean-Philippe Daviaud, bien placé pour le savoir, puisqu’il fait également partie du comité de pilotage fédéral de la primaire. Il distribue un document de douze pages, vademecum émanant de Solférino. Personne n’y touche. Il poursuit.«Aux dernières nouvelles, il sera possible d’utiliser les écoles. Et aussi les lieux municipaux.» Ici, dans ce fief du PS, «cela ne posera aucun problème, évidemment» sourit Daviaud. «Oui, mais pour les copains du XVIIe, ce sera plus dur», soupire un militant, attentif à l’arrondissement voisin, administré par la droite. Un groupe devra identifier et déterminer les bureaux de vote. «On va coller au maximum à la carte électorale.» L’idée est d’installer «entre 20 à 25 bureaux de vote» dans l’arrondissement qui en compte 60 pour une élection normale. Et de concentrer les urnes là où Ségolène Royal a fait des bons scores en 2007. Logique : «Il ne faut pas rater le peuple de gauche.» Il y en aura jusqu’à 12 000 sur tout le territoire.
La stratégie est claire, explique encore Jean-Philippe Daviaud : «Il faut s’appuyer sur le réflexe des citoyens qui vont voter et donc conserver le plus de similitudes possibles avec les scrutins habituels.
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