Nous sommes tous des RMIstes allemands – sauf les millionnaires et milliardaires

L'Allemagne est un objet
symbolique essentiel au débat politique français qui, sans elle, serait obligé
de se préoccuper de sujets tels que les conflits de répartition des richesses.
Grâce à notre «voisin d'outre-Rhin», on peut heureusement évoquer
d'un mot les heures les plus sombres et glorieuses de notre histoire, les
épopées nationales au regard rivé vers l'est, plutôt que des choses vulgaires
comme le droit du travail. Ainsi, il y a deux semaines, l'Allemagne était la
perle du continent européen, la seule à
tirer son épingle du jeu économique et à ce titre l'exemple à suivre. Depuis mercredi, on l'érige en adversaire,
conduisant seule un jeu non coopératif, à coups de comparaisons plus que
douteuses.

Ces deux positions extrêmes
sont ridicules: l'Allemagne ne peut
être parée de toutes les vertus économiques. Elle ne peut pas plus être vouée
aux gémonies au prétexte que ses dirigeants défendent les positions auxquelles ils
estiment qu'elle a intérêt (ainsi d'ailleurs que les pays de l'ancien
«bloc Mark», Autriche et Pays-Bas en tête). Si la France n'a pas
les mêmes intérêts que l'Allemagne, alors nos dirigeants doivent sortir du
tête-à-tête stérile et engager une démarche de négociation collective, quitte à
mettre dans la balance une participation à l'euro dont il est de moins en moins
évident qu'elle nous arrange. L'invocation de la morale, des valeurs et de la nation est stérile et hors de propos.

Ces positions sont surtout
dangereuses parce qu'elles négligent un fait
simple, qu'une devinette illustrera à merveille: un
«bénéficiaire» du RSA activité est-il plus proche de Jean-Claude
Trichet, ancien président de la Banque centrale européenne, ou d'un
«bénéficiaire» d'un «1 euro job»? Présenter le
problème ainsi, c'est y répondre. C'est aussi franchir un pas politique que nos
femmes et hommes politiques ont manifestement du mal à envisager: il n'y a pas de
«problème allemand». Il y a un conflit de répartition des richesses
entre classes sociales, qui traverse l'Union européenne et chacun de ses Etats.

Car l'Allemagne, si elle est le paradis
enchanté de la lutte contre l'inflation et de la «vertu» budgétaire
(comment un budget peut-il être moral?), est aussi le pays de
l'OCDE dans lequel la pauvreté a le plus augmenté sur la période récente. Les réformes conduites par le gouvernement
«social-démocrate» de Gerhard Schröder sous le nom de «paquet
Hartz», du nom de son ministre du travail, y sont pour beaucoup. Elles
ont multiplié les statuts d'emploi précaires et engagé le pays dans une
politique de déflation volontaire dont les pauvres et les ouvriers payent
aujourd'hui le prix.

Ainsi, ce à quoi on assiste, ce
n'est pas à l'alliance de l'Allemagne et de ses satellites contre les pays du
sud, c'est à l'alliance des représentants du monde de la finance, d'où
qu'ils soient, contre les prolétaires. Car
les dirigeants allemands, de par le régime macro-économique dans lequel ils ont
engagé leur pays et le reste de la zone euro, ne jouent pas pour leur
peuple: ils jouent pour leurs rentiers, via la déflation et la baisse du
coût de la main d'œuvre, comme notre gouvernement a choisi de sacrifier le
peuple grec à la santé financière de nos banques.

Voir les hiérarques socialistes
reprocher à Nicolas Sarkozy sa collaboration avec l'Allemagne, alors même
qu'ils sont fermement déterminés à mettre en œuvre la pol

via blogs.mediapart.fr

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