Pour emporter sa réélection en 1988, François Mitterrand avait misé sur « l'Europe qui protège ». Nicolas Sarkozy reprend la recette : son devoir, a-t-il expliqué sur TF1 jeudi soir, est de « protéger » les Français, et il compte le faire en se collant le plus près possible de la grosse et solide Allemagne.
La différence entre Mitterrand et Sarkozy, c'est que le premier était dans la suite logique d'un combat d'une vie. C'est sans se forcer qu'il a, en 1984, donné la main à Helmut Kohl dans le cimetière de Verdun…
Nicolas Sarkozy, lui, a dû accomplir un formidable tête à queue pour revenir dans le chemin préféré des élites françaises, qui vantent depuis des décennies le « modèle allemand ».
Elle est loin, la « rupture » de 2007
Souvenez-vous : au début de son mandat, Nicolas Sarkozy se voulait « en rupture », à la fois vis-à-vis de la diplomatie traditionnelle de la France et de la discipline économique.
- Pendant sa campagne, il avait avait giflé l'Allemagne : « La France n'a jamais exterminé un peuple, la France n'a pas inventé la solution finale. » Puis il s'était rapproché de Washington et de Londres et, crime de lèse-gaullisme, il avait même décidé la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'Otan…
- Sur le plan économique, il critiquait la Banque centrale européenne. Sous l'influence de son conseiller Henri Guaino, il défendait en décembre 2008 la décision de recourir à un « surcroît d'endettement » (« nous ne pouvons faire autrement ») puis vantait en juin 2009, à Versailles devant le Congrès, les « bons déficits », ceux qui, consacrés à l'investissement, « préparent l'avenir ».
Nicolas Sarkozy est rentré dans le rang. A la télévision, jeudi soir, il a insisté à plusieurs reprises sur sa volonté de rapprocher la France de l'Allemagne.
Au point que même Le Figaro s'est étonné de cette « obsession ». La France et l'Allemagne, a-il expliqué, doivent devenir « le poids lourd » de l'Europe. Il faut converger vers l'Allemagne, « un système qui marche ». Adieu l'hétérodoxie et le rapprochement atlantiste.
Emmanuel Todd : « Sarkozy se soumet »
Commentaire de l'historien Emmanuel Todd :
« Nicolas Sarkozy renoue avec la “germanolâtrie” traditionnelle des élites de la droite française, fascinées par la culture de discipline et de hiérarchie de ce pays. Après avoir manifesté de l'indiscipline vis à vis de l'orthodoxie de son camp, Sarkozy se soumet.
C'est le signe qu'il a perdu le contrôle. Pour la gauche, c'est une chance de jouer sur une corde plus patriotique. »
On peut presque dater avec précision cette « perte de contrôle », ajoute l'historien : lorsque Nicolas Sarkozy n'a pas réussi à changer de Premier ministre, comm
via www.rue89.com