Mais c’est surtout dans les premiers mois de 2011 que François Hollande creuse ce sillon de manière encore plus nette. Ce n’est qu’une anecdote, mais elle est significative. Le 24 mars 2011, le journal Les Echos demande au détour d’un entretien avec François Hollande s’il accepte une filiation avec Raymond Barre, le père-la-rigueur que la gauche a chassé de son poste de premier ministre en 1981. «On vous qualifie parfois de Raymond Barre de gauche. Est-ce un compliment à vos yeux?», lui demande le journal. Réponse de l’intéressé: «Je le prends avec précaution, car on ne peut pas dire que sa réussite à l’élection présidentielle ait été totale! On ne peut dire non plus que sa gestion ait été parfaite. Mais il a eu le souci de remettre nos finances publiques à flot.» En clair, il ne s’offusque pas de ce cousinage; il s’en amuse…
Inquiétante filiation! En 1981, Raymond Barre est, avec Valéry Giscard d’Estaing, le symbole de la politique réactionnaire qu’il faut mettre en échec, le premier ministre des injustices sociales, du chômage et des premiers petits boulots.
Trente ans après le 10 mai 1981 (on trouvera ici les références du livre que Mediapart a écrit pour commémorer à sa façon l’anniversaire et là celles d’un débat sur le même sujet, en présence de François Hollande et d'Arnaud Montebourg, organisé par Mediapart), le voici en partie réhabilité par les héritiers de ceux qui l’ont battu.On pourrait penser que ce constat est exagéré et que François Hollande a simplement répondu avec courtoisie, sans y prendre garde, à une question qu’il jugeait accessoire. Et pourtant, non! Car quelques mois plus tard, François Hollande, qui, dans l’intervalle, a officiellement déclaré sa candidature aux primaires socialistes, confirme de manière spectaculaire qu’il est partisan d’une forte rigueur budgétaire (lire Adieu Keynes! Vive Raymond Barre!).
Alors que le projet socialiste, refusant la politique d’austérité du gouvernement et la réduction à marche forcée des déficits publics, préconise un retour des déficits publics français sous la barre des 3% du produit intérieur brut (PIB) seulement à l’horizon de 2014, et non en 2013 comme s’y est engagé Nicolas Sarkozy, François Hollande prend en effet ses distances avec les priorités de son propre parti pour applaudir celles de la droite. Sous le titre «François Hollande: la dette est l’ennemie de la gauche et de la France», c’est à la faveur d’un entretien au Monde (daté du 16 juillet) qu’il se livre à cet exercice.
«Dans le projet socialiste, il est question de ramener les déficits à 3 % du PIB en 2014. N’est-ce pas trop tard?, interroge le quotidien.
– Il faut rééquilibrer nos comptes publics dès 2013, répond François Hollande.
– Dès 2013?, insiste le journal.
– Oui. Je ne le dis pas pour céder à je ne sais quelle pression des marchés ou des agences de notation mais parce que c’est la condition pour que notre pays retrouve confiance en lui. Nous ne pouvons pas laisser gonfler la dette publique au risque de faire de la charge de nos intérêts le premier budget du pays, ce qui altérerait toutes nos marges de manœuvre. La dette est l’ennemie de la gauche et de la France. Si je suis élu, la première réforme du quinquennat sera la réforme fiscale. Le candidat qui annonce qu’il n’y aura pas d’effort supplémentaire après 2012 sera un président qui se parjurera», confirme François Hollande.
On connaît la suite: dans une étonnante compétition libérale, sa rivale dans la primaire, Martine Aubry, f
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