Nous pensions annoncer en ces premiers jours du mois d'août marqués par une chaleur caniculaire que le blog "un monde 100 drogues" allait s'offrir quelques jours de congés!
Le vote par la chambre des députés d'Uruguay d'un projet de loi sur la légalisation du cannabis nous incite à en reporter l'annonce. Bien évidemment, il faudra encore attendre que le Sénat ratifie ce texte, mais s'il le fait, et cela a de bonnes chances de se produire, ce pays sera le premier à en contrôler la production et la vente.
L'intérêt majeur de ce vote est de renforcer celles et ceux qui militent pour que soit imaginée une nouvelle politique des drogues : la guerre frontale est un échec aussi couteux que douloureux, il est légitime d'explorer d'autres pistes. L'Uruguay, sans connaître la même crise que le Mexique ou d'autres pays, est bien placé pour contester les effets catastrophique de la guerre à la drogue. C'est ce que vise le texte adopté : contrôler l'ensemble des étapes (achat, production, vente et distribution, etc….) pour "minimiser les risques et réduire les dommages de l'usage du cannabis". Evitant de promouvoir une consommation, qui, de fait, existe déjà et dont elle prend acte, cette nouvelle loi très détaillée et pensée, veut détacher les consommateurs des réseaux mafieux et lutter contre le grand trafic de drogue tout en accompagnant les risques de l'usage. Nous savons les risques d'un usage de cannabis, largement dépendant de l'âge de l'usager, de la quantité de substance utilisée et de la qualité du produit. Et nos collègues d'Uruguay sont loin d'en être ignorant. La nouvelle loi fixe un cadre, des limites, et essaye d'organiser un accès raisonné à ce produit, elle est tout sauf un abandon.
Certains traiteront avec mépris cette décision : après tout, ce n'est que l'Uruguay, un pays d'Amérique du Sud, loin de l'Europe, etc.. Ils ont tort. L'Urgugay est un pays démocratique, comparable en bien des points à nos démocraties.
Oser tirer les leçons d'un échec, celui de la guerre à la drogue, est tout sauf irresponsable. Proposer une approche différente de ces questions, à l'échelle d'un pays, est une vraie leçon de politique. Et cela d'autant plus que l'opinion publique n'est pas majoritairement en faveur d'une légalisation. Choisir un autre chemin que la prohibition pour organiser la régulation est un acte de courage politique.En France, alors que se multiplient les signes qui montrent la place que tient ce produit dans la vie de nombreux concitoyens ainsi que la difficulté des politiques adoptées depuis plus de 40 ans et renforcées ces 10 dernières années d'en limiter les risques, et notamment pour les plus jeunes, un rapport présenté par le Professeur Reynaud propose pour commencer à avancer de le sanctionner d'une contravention. Parions que cette mesure ne sera pas adoptée…
Même au coeur de l'été français, il faut saluer le choix fait par les députés de l'Uruguay, un choix courageux, car ouvrant à une expérimentation, mais un choix intelligent et de raison : oser changer une politique qui a échoué.
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