Les coulisses de l’université populaire
Les acteurs de la vie culturelle caennaise ne tarissent pas d’éloges sur l’université populaire. « Une vraie belle dynamique », pour Emmanuelle Dormoy, adjointe à la culture de la ville qui souligne que « Michel Onfray agit en citoyen et penseur, ancré dans son territoire et donnant son avis sur ses problématiques, comme la question de la fusion des régions de Haute et Basse-Normandie ». La municipalité de Caen est passée à droite en 2014 et la nouvelle équipe se montre des plus désireuses d’aider l’université populaire : subvention annuelle de 10 000 euros, mise à disposition gratuite du musée des Beaux-Arts, où se tiennent certains cours.
En froid avec la précédente municipalité, l’université populaire s’était un temps installée dans l’université de Caen. « Michel Onfray m’a demandé un amphi car il ne trouvait aucun lieu pouvant accueillir plusieurs centaines de personnes. Je n’avais aucune raison de le lui refuser. Je trouvais intéressant qu’une université accueille en son sein un courant de pensée différent, et de nouveaux publics », raconte Nicole Le Querer, ancienne présidente de l’université de Caen. Même enthousiasme de Stéphane Grimaldi, directeur du Mémorial de Caen : « Nous avons accueilli une série de séminaires sur la guerre organisés par l’université populaire de Caen et j’ai été très agréablement surpris de voir arriver des publics nouveaux que nous n’avions jamais pu capter. »
Le seul son de cloche dissident, on le trouve chez Marie-Jeanne Gobert, élue communiste à la mairie de Caen et vice-présidente du Conseil régional de Basse-Normandie : « Ce qui me pose problème, avec l’université populaire de Caen, c’est que la structure soit soutenue entièrement par des fonds publics. Le public qui la fréquente devrait participer à son financement. Contribuer, même de manière symbolique, relève de l’éthique associative. C’est un principe fondateur de la vie associative, qui vaut pour le sport comme pour la culture, que chaque adhérent s’affranchisse d’une cotisation. » La critique de l’élue cible les deux points les plus critiquables de l’université populaire de Caen : son fonctionnement interne et ses finances.
Légalement, l’université est organisée par l’association loi de 1901 Diogène & Co. Mais cette dernière n’a aucun adhérent. Et ne souhaite pas en avoir. Son bureau (Micheline Hervieu, ancienne libraire d’Argentan et vieille amie de Onfray, comme présidente et François Doubin, qui fut ministre radical de gauche de François Mitterand et ancien maire d’Argentan, comme trésorier) est le même depuis 2002 et ne joue aucun rôle dans le fonctionnement de l’association. De fait, seul Michel Onfray et ce qu’il appelle « sa garde rapprochée » formée de vieux amis normands, dirigent l’université populaire de Caen (en particulier dans le choix, par cooptation, des nouveaux enseignants), hors de toute procédure formalisée.
Antoine Spire, qui y a enseigné durant sept ans l’éthique médicale, le déplore : « L’université populaire de Caen, contrairement à ce qu’affirme Michel Onfray, n’est pas un intellectuel collectif. Les enseignants ne se voient qu’une fois l’an, pour le séminaire de rentrée où chacun présente ce qu’il compte enseigner. Après, ils sont tout seuls et n’ont aucune idée de ce que racontent leurs collègues. Il n’y a aucune collégialité ». Onfray ne le conteste pas : « J’ai souhaité, au départ, la collégialité. Cela s’est vite avéré ingérable. Il y avait des problèmes d’ego. Il n’y avait pas vraiment de souci de l’intérêt g
via www.mediapart.fr