Dans la compétition pour la primaire socialiste,
François Hollande a pris une décision importante. Il s'est attaché les services
d'un chargé de communication qui ne passe vraiment pas inaperçu. Courant chaque
jour micros et caméras, parlant inlassablement, presque plus que son patron, il
est visiblement doté d'une formidable énergie pour tenter d'arracher la
conviction de ses auditoires successifs.Le seul problème – mais de cela,
François Hollande ne semble guère se soucier –, c'est que ce sont les milieux conservateurs et les milieux d'affaires
que le dévoué chargé de communication s'applique à cajoler. Avec un discours
bien rodé, et qui peut se résumer à cela: si vous voulez que rien ne change,
votez… Hollande!Cet attaché de presse, c'est de
fait Jean-Pierre Jouyet, l'ami de François Hollande, qui a trahi la gauche en
2007 pour devenir secrétaire d'Etat aux affaires européennes, puis président
de l'Autorité des marchés financiers (AMF).Loin de respecter le devoir de
réserve auquel il est astreint dans cette fonction, il a en effet fait le choix
depuis plusieurs jours, avec la bénédiction de l'Elysée que l'affaire selon nos informations amuse
beaucoup, de changer encore une nouvelle fois de camp et de conduire une
tapageuse campagne en faveur du dirigeant socialiste. En suggérant à chacune de
ses interventions qu'il est le mieux placé pour conduire une politique économique
et sociale ancrée radicalement… à droite!Qu'on en juge! Dans Le Point (n°2035) du 15
septembre 2011, la journaliste qui rend compte d'une rencontre avec lui raconte:
« Sans mélanger les genres: Jouyet ne s'immisce pas dans l'activité politique de
Hollande. Mais il lui donne des avis, le fait rencontrer des personnalités, est
toujours là quand il le faut. "Je suis tenu à la neutralité mais je ne lâche pas
mon amitié. Je l'ai dit au Président de la République." Alors, si en 2012,
"François" entrait à l'Elysée, accepterait-il d'être son secrétaire général? La
réponse fuse: "Cela ne se refuse pas."»D'entrée, donc, tout est dit. Désormais, Jean-Pierre
Jouyet, quand il va s'exprimer, aura une double casquette. Il aura celle du
président de l'AMF – même si ce travail visiblement ne l'accapare pas trop malgré la crise économique historique. Mais comme l'Elysée tolère, allez savoir pourquoi, qu'il
viole à tout bout de champ son obligation de réserve, il aura dans le même
temps celle de virtuel futur secrétaire général de l'Elysée et d'attaché de
presse du candidat à la primaire socialiste.Cette double casquette, Jean-Pierre Jouyet l'avait,
en vérité, déjà étrennée depuis quelques jours au micro de France Info. C'était
le 13 septembre. Ce jour-là, au micro de la radio publique, le patron de l'AMF
parle de la crise, des marchés, de la Grèce… Et soudainement, sans prévénir, se transmutant en chargé de presse un tantinet
hystérique de François Hollande, il se lance dans une charge, à dire vrai
largement incompréhensible pour l'auditeur lambda, contre Martine Aubry et ceux
qui la conseillent, en particulier l'économiste Daniel Cohen.
via www.mediapart.fr