Jean Ortiz : « L’Espagne relève le drapeau républicain » | L’Humanité

Le devoir de mémoire face à une amnésie imposée. Ces vingt dernières années, l’Espagne a vécu sur un mythe fondateur complètement inventé : la transition. Un concept créé pour faire consensus et qui a été exporté au Chili, en Uruguay, en Argentine. Tous ces pays sont revenus sur ces lois sauf en Espagne. La loi d’amnistie, ou plutôt d’auto-amnistie, permet l’impunité du régime franquiste, des ses cadres et de ses crimes depuis 1977 jusqu’à aujourd’hui. Franco l’a clairement dit avant de mourir, il a laissé le régime tout attaché et bien attaché au service de l’oligarchie financière. La transition a été le rétablissement de la monarchie afin de verrouiller le système. L’oligarchie franquiste a pu tranquillement se recycler. Le franquisme n’est pas qu’une dictature, il s’agit d’un système qui a perduré après la mort de Franco et qui englobe la monarchie. Depuis une dizaine d’années, j’ai assisté à un retour de mémoire assez extraordinaire. Un retour du refoulé. Les drapeaux républicains sont visibles dans les manifestations et les mouvements sociaux. Un phénomène impensable il y a encore 10 ans. On assiste à une accélération de l’histoire. Toute cette architecture, cet édifice de la transition, s’effondre. L’année 2015 confirme ce chambardement avec l’ascension d’un mouvement comme Podemos.
 
CHEZ LES JEUNES, L’IDÉE D’INSTAURER UNE RÉPUBLIQUE EST MAJORITAIRE ET 62 % DES ESPAGNOLS RÉCLAMENT UN RÉFÉRENDUM POUR CHOISIR ENTRE MONARCHIE ET RÉPUBLIQUE.
 
Les prochains scrutins locaux, régionaux et législatifs devraient nous confirmer ce phénomène. Aujourd’hui, de nombreux sondages constatent que moins d’un Espagnol sur deux croit encore à la monarchie. Les classes dominantes tremblent à l’idée que ce système disparaisse. Chez les jeunes, l’idée d’instaurer une République est majoritaire. 62 % des Espagnols réclament un référendum pour choisir entre monarchie et République. Cinq ans auparavant, ce discours était impensable et même « tabouisé ». Aujourd’hui, ce choix s’est imposé dans le débat citoyen, même si la victoire n’est pas acquise. L’histoire s’accélère. L’exigence d’un processus constituant a été longtemps portée par le parti Izquierda Unida. Podemos a repris cette initiative. Le régime est donc entré dans une crise durable. Car la majorité des Espagnols veulent s’exprimer et choisir leur Constitution.
La solution pour éviter que cette crise dégénère, c’est une République. Elle ne doit pas être une copie de la Seconde République de 1931. À l’époque, il n’y a jamais eu de danger communiste, qui a servi de prétexte au coup d’État. Ils ont liquidé un projet réformiste, modéré et absolument pas révolutionnaire, mais au bilan social et sociétal insupportable pour l’oligarchie, la banque, l’Église, l’armée… Il faut aujourd’hui une République qui soit anticapitaliste, sociale, fédérale et plurinationale. Si on veut régler les problèmes régionaux qui secouent l’Espagne avec la Catalogne, il faut créer une nation de nations. Le droit à l’autodétermination, le droit de décider sont possibles dans le cadre d’une Espagne qui soit un État plurinational. Ce caractère doit être reconnu.
La Bolivie est parvenue à ce consensus

via www.humanite.fr

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