Jean GADREY » Blog Archive » « La crise de la croyance économique » de Frédéric Lebaron

Dans « La crise de la croyance économique » (éditions du croquant), le sociologue Frédéric Lebaron nous offre une interprétation très originale de la crise. Et d’une grande importance politique. Car si l’économie de la crise a déjà été disséquée, ses acteurs principaux identifiés, des mesures et des politiques alternatives proposées, on ne disposait pas encore d’une analyse combinant étroitement les « faits », les acteurs ET LES CROYANCES. Or ces dernières manifestent aujourd’hui à la fois une forte inertie (le credo néo-libéral reste dominant, en tout cas du côté des élites) et de considérables tensions. Et c’est au fond l’imbrication entre la crise « cognitive » ou symbolique » et la crise (financière, économique, sociale et écologique) qui est au cœur de la recherche de l’auteur.

« Recherche » ne doit pas effrayer : tout est fait pour que les citoyens puissent s’approprier l’essentiel de ce livre. Ils y retrouveront d’ailleurs des faits, raisonnements et enchaînements plus ou moins connus (par exemple l’interprétation dominante de la crise par des défauts de « régulation »), mais nettement enrichis par la prise en compte des « champs » des discours, des théories concurrentes et de leurs « structures symboliques ». Les dominants du « capitalisme étatico-financier » ont le plus grand mal à gérer une tension entre leur libéralisme économique fondamental et leur reconnaissance contrainte du rôle essentiel des États néo-libéraux dans la crise. Et d’ailleurs, dans le champ du pouvoir, ils se comportent différemment selon qu’ils sont dirigeants politiques, banquiers centraux ou grands patrons. Leur compromis devient plus instable.

Autre tension : la forte domination économique états-unienne est affectée dans la crise, pendant que demeure l’essentiel de la domination symbolique des théories et conceptions économiques made in USA. Plus généralement, le chapitre 5 traite des « acteurs et contradictions du capitalisme étatico-financier », permettant de rendre visible un modèle sociologique de la crise.

Originale aussi est l’analyse de la « crise du sens, crise du chiffre », où l’auteur, qui s’intéresse depuis longtemps à ces questions, montre que l’évaluation des performances (des pays, des entreprises, etc.), par exemple celle de la croissance, est ébranlée sous les coups de boutoir de la crise globale. Comment ne le serait-elle pas dès lors que la crise a éclaté alors que, en 2007, tous les indicateurs usuels étaient au beau fixe et que presque tous les commentateurs « autorisés » nous promettaient « la meilleure décennie de tous les temps » (citation en exergue du livre) ?

Frédéric Lebaron estime que « le désordre cognitif provoqué par la crise est loin d’être résorbé et qu’il semble même s’aggraver ». Il ne s’agit pas d’une « crise de confiance ponctuelle » mais d’une « profonde crise de croyance qui met en cause les fondements de l’ordre économique mondial ».

via alternatives-economiques.fr



18 Frédéric Lebaron
envoyé par 100voixpourlagauche. – L'actualité du moment en vidéo.

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Translate »
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x