Les vieux sont tombés sur Montebourg. Il avait osé suggéré qu'ils devaient faire de la place aux jeunes à l'Assemblée nationale, où la moyenne d'âge est de 59 ans et cinq mois : le député de Saône-et-Loire, fringant à défaut d'être vraiment jeune, a demandé au PS de fixer à 67 ans l'âge limite des candidats à la députation en juin 2012.
Jack Lang, 72 ans, s'est étranglé : « Avec Montebourg, me voici donc promis à la guillotine », se plaint-il dans le Journal du dimanche, soutenu par d'autres septuagénaires courroucés.
Difficile pourtant de nier que la France est devenue une gérontocratie. L'Assemblée nationale élue en 2007 est la plus vieille de Ve République. Parmi les députés, 272 avaient alors plus de 60 ans, et douze moins de 40 ans. Soit 1 « junior » de moins de 40 ans pour 9 seniors, quand en Angleterre le rapport de 1 pour 3 et qu'en Allemagne les moins de 40 ans sont 1,5 fois plus nombreux que les plus de 60 ans.
« Sommes-nous représentés ? » Non
Poser ainsi le débat ne suffit pas : ce n'est pas l'âge du capitaine qui est essentiellement en cause, c'est sa longévité. La démocratie est affaiblie par la professionnalisation des hommes politiques – qui sont rarement des femmes. Cette question n'est qu'un des nombreux aspects de la crise actuelle de la représentation, et plus généralement de notre démocratie.
A Grenoble, ce week-end, une palanquée d'intellectuels de gauche, à l'invitation de l'historien Pierre Rosanvallon et de son club La République des idées, a organisé trois jours de discussion sur le thème « Refaire société ». L'une des tables rondes posait la question : « Sommes-nous représentés ? ». Et la réponse des trois orateurs était sans ambiguïté : non. Nous ne le sommes plus.
Est-ce à dire que nous ne sommes plus en démocratie ? La question était ouvertement posée à Grenoble, dans ce cénacle pourtant modéré. Il est vrai que le contexte européen ne prêtait pas à l'optimisme : tout donne l'impression d'une démission progressive des représentants politiques face aux marchés, sans qu'aucune autre forme de démocratie ne prenne la relève.
La fin des trois « représentations »
Pour le politiste Rémi Lefebvre, professeur à Lille, spécialiste du PS, la représentation est minée dans ses trois fonctions :
1Représenter, c'est d'abord agir au nom des citoyens
Or « l'impuissance a envahi la sphère publique », constate-t-il. Il n'y a plus rien à déléguer puisque les politiques se sont dépossédés de leurs pouvoirs. Le jeu politique se résume selon lui à une course aux sondages.
« La politique a perdu son illusio, pour reprendre le concept bourdieusien : la croyance en son importance s'affaisse. »
Florence Faucher-King, chercheuse à Sciences-Po, a décrit le cercle vicieux dans lequel les démocraties se délitent : la crise de la représentation entraîne une perte de confiance da
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