Ces chiffres affolants devraient être une sirène d’alarme à la Commission européenne. À écouter les dirigeants européens, ils ne sont qu’un critère comme un autre. Dans sa présentation, le Commissaire européen des finances, Olli Rehn n’y a même pas fait allusion, l’inflation et la confiance des marchés lui paraissant beaucoup plus important. Dans le préambule du rapport, un seul petit paragraphe est consacré à cette catastrophe : « Le marché du travail reste un sujet préoccupant. L’emploi devrait encore diminuer au cours des trimestres à venir. Le taux de chômage reste intolérablement haut dans toute l’Europe et plus encore dans les États membres affrontant des larges ajustements. Cette situation a de graves conséquences sociales et pèsera, si le chômage s’enracine structurellement, sur les perspectives de croissance. »
Ce sombre environnement économique fait exploser toutes les prévisions de redressement budgétaire et d’endettement public. Mais là encore, au vu des précédents de la Grèce, ce n’est pas une surprise. Ainsi, les experts européens s’attendent, compte tenu de la faible croissance, à ce que l’endettement public moyen dans l’ensemble de la zone euro, en dépit de toutes les mesures d’austérité prises, continue de grossir. En 2012, il a atteint les 93 %, contre 88 % l’année précédente. Il devrait dépasser les 95 % en 2013 et continuer à augmenter en 2014.
Pour gommer ces résultats peu concluants, la Commission européenne insiste sur les effets méritoires de sa politique de consolidation budgétaire. Les déficits publics sont en nette diminution, se félicite-t-elle. Ils ont atteint en moyenne 3,5 % dans la zone euro et devraient tomber à 2,8 % en 2013. Il y aura au moins un chiffre, le plus précieux aux yeux de la Commission européenne, qui sera respecté.
À y regarder de plus près, de sérieuses divergences pourtant se manifestent au sein de la zone euro. Sans parler de la France, qui est sur une tendance de 3,7 % de déficit selon les prévisions, si l’Europe ne lui impose pas de prendre des mesures d’austérité supplémentaires, d’autres pays sous tutelle européenne se préparent à de sérieux écarts. En Espagne, la détérioration économique est telle que le gouvernement table au mieux sur un déficit de 6,7 du PIB en 2013. Ce dernier, selon les prévisions, devrait remonter à 7,2 % en 2014. De même, le gouvernement portugais exclut-il de pouvoir revenir à un déficit de 3 % en 2014 – l’Europe lui a accordé une année supplémentaire –, alors que celui-ci risque de s’élever à 5 % encore en 2013.
Ainsi, quel que soit le critère pris, l’échec est patent. Il avait été annoncé depuis longtemps par les économistes atterrés. Mais l’atterrement est en train de gagner les économistes les plus orthodoxes comme les milieux financiers. De plus en plus de voix s’alarment devant la dégradation sociale de l’Europe et son chômage insoutenable, perçus comme les nouveaux risques de la zone euro.
« Comme le montrent les prévisions atroces de croissance et d’emploi publiées aujourd’hui, l’Europe poursuit une stratégie, qui est économiquement imbécile, politiquement irresponsable, socialement indéfendable et finalement auto-destructrice, même s’il advient que les objectifs de réduction de déficit recherchés sont atteints », tonne le groupe de réflexion Re-define, regroupant des banquiers, des hauts fonctionnaires. « Comme il devient manifeste que les programmes d’austérité conduisent des souffrances non justifiées spécialement pour des millions de personnes qui ont été jetées dans le chômage et la pauvreté, la résistance contre ces programmes ne peut que s’accroître. Une résistance qui peut amener des millions de personnes à souhaiter se lib
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