Parmi les 26 commissaires sur le départ en 2014 (les deux autres ont rempilé, sous Jean-Claude Juncker), neuf ont déjà fait jouer les portes tournantes, et rejoint des postes de premier plan dans le secteur privé. Cette statistique relance les vieilles inquiétudes sur la proximité de la commission européenne avec de grandes firmes européennes, qui « achètent » leurs entrées dans l’exécutif. D’après le décompte de l’ONG, sur les 117 postes et fonctions occupés par les 26 ex-commissaires, huit sont problématiques, et n’auraient pas été validés par la commission si celle-ci avait respecté les textes d’éthique en vigueur.
José Manuel Barroso se fait épingler pour avoir accepté pas moins de 22 postes (tous ne sont pas rémunérés), tout à la fois président d’honneur de différentes universités et fondations, mais aussi membre du groupe de pilotage des conférences Bilderberg, ou encore président d’honneur du comité organisant le European Business Summit, l’un des principaux événements annuels de lobbying à Bruxelles (on peut retrouver l’inventaire établi en anglais par CEO ici).
Parmi les commissaires les plus malmenés dans l’étude de CEO, la Néerlandaise Neelie Kroes (passée par la concurrence, puis le marché numérique) est devenue conseillère spéciale pour l’Europe du géant de la finance Bank of America Merrill Lynch, et travaille aussi pour des groupes de capital-investissement. Le Belge Karel de Gucht, ex-commissaire au commerce qui a lancé le chantier du traité transatlantique (TTIP ou TAFTA), est aujourd’hui payé par le groupe de télécoms Belgacom.
La Luxembourgeoise Viviane Reding, dont le bras de fer avec la Hongrie de l’autoritaire Viktor Orban a marqué les esprits à Bruxelles, a été élue au printemps eurodéputée. Ce qui ne l’empêche pas d’accepter un siège au conseil d’administration du groupe de technologie numérique Agfa-Gevaert. Elle avait également obtenu le feu vert de la commission pour rejoindre le conseil d’administration du groupe minier Nyrstar, mais elle a finalement décidé de jeter l’éponge, a-t-elle fait savoir au site spécialisé Politico.
« La réglementation encadrant les revolving doors reste inadéquate, et n’est de toute façon pas appliquée », résume Vicky Cann, de l’ONG CEO. Au terme du premier mandat Barroso, en 2010, la reconversion express de certains commissaires avait pourtant provoqué de nombreux remous. C’était par exemple le cas de l’Irlandais Charlie McCreevy, ex-commissaire au marché intérieur (et donc à la régulation financière), qui avait rejoint les activités sur le commerce des dérivés du groupe BNY Mellon, mais aussi le conseil d’administration de la compagnie Ryanair, et enfin celui de Sentenial, une entreprise qui vend aux banques sa technologie de paiement en ligne…
via www.mediapart.fr