Des migrants continuent de mourir aux portes de l’Europe. C’est d’un homme prénommé Clément dont il s’agit ici. Il n’était pas français, mais camerounais et avait quitté son pays et sa famille en décembre 2012 en quête d’une vie meilleure. Il était parti vers le nord, en direction de l’Union européenne. Il avait traversé la zone sahélienne et était parvenu jusqu’au Maroc. Le 11 mars 2013, il a tenté de franchir les clôtures barbelées de trois à six mètres de haut qui encerclent l’enclave espagnole de Melilla située en bordure méditerranéenne du royaume de Mohammed VI.
Selon les témoignages recueillis par plusieurs associations, il a été arrêté par les policiers, tabassé et transféré à l’hôpital de Nador, à quelques kilomètres de là. Blessé à la tête, il aurait eu le bras et la jambe fracturés. Toujours d’après les récits, il était encore très faible lorsque l’établissement dans lequel il avait été soigné l’a renvoyé. Il est retourné dans la forêt de Gourougou, zone à l’écart des regards, où les migrants se retrouvent et tentent de reprendre des forces avant d’essayer de nouveau d’escalader les barrières.
Une mission associative s’est rendue sur place le 16 mars pour rencontrer les blessés et témoigner des coups délivrés par les policiers espagnols de la Guardia civil et les forces auxiliaires marocaines constituées d’agents de sécurité sous statut militaire dépendant du ministère de l’intérieur. La petite équipe, accompagnée d’une réalisatrice italienne, Sara Creta, croise alors Clément en train de mourir des suites de ses blessures. La caméra filme.
Mediapart présente ce document vidéo inédit (à visionner dans son intégralité en bas de la page), intitulé «n°9» en référence au tee-shirt que portait le Camerounais, celui des avants-centres chargés de marquer les buts dans le football. Ce film d’une quinzaine de minutes, proposé avec deux extraits (ci-dessous), apporte la preuve des violences infligées aux migrants. Il est simultanément diffusé à Rabat ce 28 juin, lors d’une conférence de presse organisée pour le lancement d’une campagne initiée par les associations de défense des droits des étrangers au Maroc (lire le témoignage de Sara Creta sous l’onglet Prolonger). Officiellement, Clément est mort le 18 mars à l'hôpital, mais selon ses compagnons il avait perdu la vie avant.
via www.mediapart.fr