"Notre enquête ne visait pas à rentrer dans le fond des choses" (le Monde)
Face à cette polémique, les journalistes du Monde magazine se retranchent derrière la décision de justice et la volonté de simplement raconter l'histoire d'une famille qui se bat pour la réhabilitation : "Notre point de vue n'a pas été de dire que X ou Y a raison. La Cour d'Appel de Limoges a rendu un arrêt en juillet 2010, personne n'en avait parlé. C'est Thierry Lévy [l'avocat des petits-enfants] qui m’a parlé de cet arrêt et on a décidé de raconter l'histoire. Le reste est un débat d'historiens", explique Pascale Robert-Diard. Thomas Wieder, co-auteur du dossier, s'est occupé du volet historique. Assurant avoir consulté plusieurs sources différentes à propos de Louis Renault, il affirme que le but n'était pas de participer à une quelconque opération de réhabilitation : "Notre enquête ne visait pas à rentrer dans le fond des choses. Notre démarche de journaliste, c'est de montrer comment une famille marquée par une icône incarnant le mal s'appuie sur des travaux d'historiens pour réhabiliter l'honneur de son aïeul. Et comment cette famille, qui a l'impression que c'est un combat vain, en vient à saisir la justice pour trancher une question mémorielle. Aujourd'hui, le débat historiographique donne une vision plus nuancée et fine des choses qu'il y a cinquante ans où on avait une vision plus caricaturale". Pour le journaliste du Monde, Annie Lacroix-Riz serait d'ailleurs "extrêmement contestée dans le milieu universitaire".
Fallait-il pour autant ne donner la parole qu’aux défenseurs de Louis Renault ? Du côté de France 2, on tente de justifier l'absence d'historiens défendant la thèse de la collaboration : "C'est écrit dans les livres d'histoire, ça fait 70 ans qu'on nous le dit", explique Gérard Grizbec, l'auteur du reportage. L'idée, c'était donc de s'interroger sur le débat d'aujourd'hui". Mais comment peut-on poser les clés d'un débat sans donner la parole à la partie adverse ? "Peut-être que le titre est mal choisi", reconnaît Grizbec tout en expliquant qu'il n'a "jamais envisagé" de donner la parole à d'autres historiens : "On est obligé d'être subjectif. Moi je remets en cause une idée reçue. Mon problème n'est pas de donner la parole aux uns et aux autres. Mon but n'est pas de dire, c'est un mec bien ou pas bien. Je ne donne pas la vision classique et traditionnelle du personnage".
De son côté, Annie Lacroix-Riz conteste la présence de Julian Jackson, l’historien interviewé par France 2 : "C'est un auteur de synthèse, pas inintéressant certes, mais il n'a pas du tout approfondi le sujet. Il a écrit un livre sur les années 1940-1944, mais cet ouvrage n'est appuyé par aucune source et ne cite Renault que sur deux lignes. C'est malhonnête de s'adresser à quelqu'un qui n'a pas travaillé sur Renault", explique-t-elle avant de conclure que le traitement médiatique de cette affaire relève d'un "traitement idéologique de l'histoire, purement scandaleux".
Le texte de Mme Lacroix-Riz :
http://www.comite-valmy.org/spip.php?article1194