Sous subvention publique, via la défiscalisation
Le principe d’une subvention publique, via la défiscalisation, au service des plus privilégiés reste gênante. Après le bâtiment des sciences et des arts, qui a coûté 7 millions d’euros, un million étant versé par la fondation, un théâtre a été financé par la fondation Lagardère (selon nos informations, la fondation Lagardère a dépensé quelque 600 000 euros pour son aménagement, également défiscalisés à 66 % mais la fondation, « confrontée à un problème d'archives », n’a pas confirmé). Etait-il bien d’utilité publique de payer, comme vient de le faire la fondation Jeannine Manuel, pour la construction d'un imposant mur d’escalade ?
Conscients, sans doute, que la compréhension entre les peuples était une justification un peu légère ou par trop floue, pour solliciter les deniers publics, les responsables de la fondation ont donc lancé il y a deux ans « un magnifique projet », dixit la direction, intitulé : « Grandir ensemble ». Officiellement, à la manière de Sciences-Po s’ouvrant aux élèves de ZEP, il s’agit pour l’école de diversifier son recrutement en prenant en charge la scolarité d’enfants de milieu populaire.
Depuis que le programme a été lancé, seuls deux élèves ont intégré l’école en CP par cette voie. Pourquoi si peu ? « C’est le démarrage du projet, il faut leur donner du temps », plaide-t-on à la Fondation de France. En interne, on explique pourtant les ratés tragi-comiques de cette opération. « Ils ont cherché à faire des partenariats avec des écoles de la banlieue nord mais se sont fait claquer la porte au nez. L’idée de sélectionner un enfant de Créteil pour l’amener tous les matins en taxi dans les beaux quartiers et le ramener le soir chez lui, tout cela au nom de la mixité sociale, bizarrement, cela ne leur a pas plu ! » raconte, mi-moqueur, mi-atterré, un salarié.
L’EABJM s’est donc tournée vers les écoles du quartier pour trouver ces perles rares, capables de donner une coloration un peu plus sociale à la Fondation. Mais pas question de prendre n’importe qui pour autant. « Ces enfants doivent avoir de très bonnes aptitudes, être issus de l’immigration et venir de milieu défavorisés », précise Florence Bosc, directrice du développement de la Fondation Jeannine Manuel dans un entretien à l’association de parents d’élèves. Après plusieurs étapes de sélection dans les maternelles du quartier, les prétendants au CP ont aussi dû passer « un bilan d’orthophonie et un test WPPSI », pour mesurer leurs capacités intellectuelles. Immigré et pauvre passe encore, mais quand même pas idiot !
En interne, cette laborieuse opération de communication fait sourire. La politique sociale et salariale en vigueur à l’école, nettement moins. Selon nos informations, entre le professeur contractuel payé au Smic et l’équipe de direction, les salaires à l’EABJM vont de 1 à 15. Contactée à ce sujet, la directrice Élisabeth Zéboulon nous a répondu qu’il fallait comparer ce qui était comparable. « Les enseignants sont rémunérés selon les grilles du ministère de l’Éducation nationale. Pour ce qui concerne l’échelle de rémunération des personnels administratifs, elle est de 1 à 7,57 en équivalent plein temps », nous explique-t-elle.
Il reste qu’avec une double rémunération – la directrice de l’EABJM est aussi gérante de la société Remi, laquelle, au sein de l’école,
via www.mediapart.fr